Parade de la police congolaise, lors de la manifestation de passation de pouvoir après les élections de 2018 au palais de la nation, Kinshasa 2019, @HabariRDC
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Faut-il désarmer les policiers pour sécuriser la population à Kinshasa ?

En trois jours, trois personnes ont été abattues à Kinshasa par balles par des forces de l’ordre. Voilà qui relance l’éternel débat sur le port d’armes par nos policiers en pleine capitale, alors que sous d’autres cieux, la police utilise des moyens de défense plus dissuasifs que répressifs : les armes non létales. Le temps n’est-il pas venu de tenter l’expérience d’une police sans arme à feu et plus proche de la population à Kinshasa ?

Lundi 28 octobre sur l’avenue Kasa-Vubu, à quelques encablures du stade des Martyrs. Un accident venait de se produire entre deux motocyclistes dont l’un roulait en sens interdit. Face à une situation qui dégénérait et devant le refus des autres « wewa » (conducteurs de motos-taxis) de laisser les leurs  s’expliquer au poste de police, un agent de la police a tiré à bout portant sur un motocycliste qui est mort sur le champ. S’en suivit alors une révolte et un bus de Transco a été incendié par les wewa.

Un jour plus tard, un autre wewa est abattu à bout portant sur l’avenue Kianza dans la commune de Ngaba cette fois-ci par un militaire de la garde rapprochée d’un officier des Forces armées de la RDC, qui lui reproche de ne pas accorder la priorité au convoi de son chef. Deux morts en deux jours ! Beaucoup ont stigmatisé le non-respect du code de la route et le manque de courtoisie de ces motocyclistes devenus incontrôlables. Cependant, je pense que rien ne saurait justifier qu’on tire sur eux quand on sait que la Constitution consacre, en son article 16, le caractère sacré de la vie humaine.

L’excès de zèle des gardes rapprochées

Comme si cela ne suffisait pas, un autre cas de meurtre causé par un agent de sécurité est enregistré mercredi dans la commune de Lingwala. Dans l’enceinte de l’hôpital Vijana en face de la RTNC, un garde du corps d’un ministre provincial a tiré à bout portant sur le médecin directeur de cet établissement alors que celui-ci s’opposait à l’érection d’une construction « anarchique » dans l’enclos de l’hôpital. Si dans les deux cas précédents, il s’agit des motocyclistes, ce troisième est tout de même plus choquant.

Place aux armes non létales

Dans une ville où la police est devenue plus ennemie que partenaire de la population, la situation empire quand des policiers se croyant au-dessus de tout et de la loi, sont dotés d’armes à feu.

Pas plus tard que le mois passé, un groupe de policiers en patrouille nocturne m’interpelle sur l’avenue Mushie, dans la commune de Lingwala. L’un d’eux me lance la seule phrase française correcte que tous les policiers kinois maitrisent : « Présentez-vous. » J’obtempère, mais avec eux présentation veut dire autre chose qu’exhiber ses pièces d’identité. Ils cherchent l’argent. C’est à coup d’intimidations, armes à la main, qu’ils m’ont extorqué des biens. Comme moi, plusieurs compatriotes ont déjà été au moins une fois victimes des policiers armés qui pourtant doivent nous sécuriser.

Dans ce lot de réalités de notre police, je me pose la question de l’opportunité du port d’armes par les policiers en pleine capitale. Pourquoi gaspiller les munitions à Kinshasa ? Ces balles qui tuent de paisibles Kinois pourraient être plus utiles dans des zones de conflits dans l’est du Congo. La ville de Beni par exemple a plus besoin de munitions que Kinshasa. A mon avis, il est plus que temps de passer aux moyens de maintien de l’ordre plus dissuasifs. Les forces de police doivent utiliser des armes dites non létales ou incapacitantes. Celles-ci ne tuent ni ne blessent la cible. L’humanisation des services de sécurité telle que voulue par le président Félix Tshisekedi c’est aussi cela.

En attendant, il convient bien de penser à la rééducation de policiers et autres forces de l’ordre, la brigade « Ujana » en particulier.

 

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