C’est un accord qui consacre la rupture et qui fait jaser en RDC. Après l’échec des négociations, le pouvoir a fait signer l’Arrangement particulier le 27 avril, mais sans le médiateur Cenco ni le Rassemblement de l’opposition. Du coup, les médias redoutent des violences. Une revue de presse de Didier Makal.
« Bruno Tshibala libéré ! », s’exclame La Prospérité. Le 28 avril, ce média annonce que cette signature de l’arrangement particulier change tout : « La majorité s’est reconstituée. L’opposition s’est fissurée davantage. Tandis que la société civile s’est, quant à elle, requalifiée. »
Arrangement particulier signé au risque de nouvelles violences
Plusieurs médias se demandent ce que va vivre désormais la RDC. « Face au blocage, le spectre du chaos ? » interroge Mediacongo. Il donne la réponse en évoquant des risques de « violences incontrôlables si une solution n’est pas rapidement trouvée. » Le média parle également d’une crise de « légitimité démocratique grave » et de confiance entre politiques. « Dans un climat de manque de confiance et de compréhension mutuelle, les évêques ne pouvaient plus conduire indéfiniment leur mission de bons offices », conclut Mediacongo.net.
Pour Le Phare, (journal de Kinshasa), « la Majorité opte pour un passage en force ! » Et pour quel résultat ? se demande-t-il. Cette décision de passer outre les critiques de l’opposition et de la communauté internationale inquiète. La majorité se dresse « contre les forces politiques et sociales internes qui exigent le respect strict de l’esprit et de la lettre de l’Accord du 31 décembre 2016 ». Le Phare estime que la MP vise aussi les Nations-Unies, l’Union européenne, l’OIF, les États-Unis, la Belgique, la France qui exigent « l’observation stricte du même deal politique, du reste coulé en Résolution onusienne (2348). »
Un Accord de la rupture
Cette signature de l’Arrangement particulier est une « messe noire contre l’Accord de la Saint Sylvestre », considère La Tempête des tropiques. Le média kinois relève des signes qui annoncent un mauvais présage à la suite de la signature de l’arrangement particulier : « Triomphalisme de la MP, cafouillage et précipitation, sans oublier l’absence de la Cenco et le boycott du Rassemblement. » La Tempête explique cette précipitation :
« Le chef de la 2ème chambre législative du Parlement congolais a indiqué que certains délégués à la cérémonie étaient empêchés et plusieurs d’entre eux s’étaient excusés, sans citer nommément ces délégués et sans faire mention du refus du Rassemblement de Félix Tshisekedi et du Front de Bazaiba. »
Mais deux jours après, le Front pour le respect de la Constitution autour du MLC de Jean-Pierre Bemba a signé l’Arrangement particulier. Ève Bazaiba se déclarait alors « ni intéressée, ni surprise » par cet Arrangement particulier. Elle a même dénoncé une « messe noire du Palais du Peuple », rapporte La Prospérité.
Un accord contre Katumbi et le Rassemblement ?
L’Avenir de Kinshasa estime que la signature de l’Arrangement particulier fait échec à « l’appel à l’insurrection de Katumbi. » Cet article visiblement anti-Katumbi fait comprendre que la signature de l’Arrangement particulier viserait particulièrement à mettre en déroute l’ancien gouverneur du Katanga qu’il accuse d’appeler à l’insurrection. Rappelons que le 10 avril, à partir de Marrakech au Maroc, l’opposant appelait la population « à la résistance » face au pouvoir décidé de passer en force, selon lui, en nommant Bruno Tshibala Premier ministre, contrairement à l’Accord sur la transition.
Les évêques catholiques, médiateurs dans ce dialogue qui finit mal, ont-ils exaspéré la crise ? Ont-ils été neutres, au milieu ou à côté du village ? Le Phare, qui s’interroge sur la responsabilité de la médiation catholique, indique que la Cenco rejette la responsabilité du blocage sur l’opposition et le pouvoir qu’elle accuse tous de « mauvaise foi ». Le Phare ajoute :
« Faut-il leur jeter la pierre, lorsqu’ils réaffirment que le blocage de l’Accord de la Saint- Sylvestre est imputable à la mauvaise foi de la classe politique congolaise ? Les observateurs notent que les évêques catholiques congolais ne sont pas les seuls à faire le constat du non-respect de ce compromis politique. »
Vraisemblablement, la crise ne fait que commencer en République démocratique du Congo. La rupture semble désormais consommée entre opposition et pouvoir, autour d’un accord pourtant censé régler les divergences.