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A Lubumbashi l’évêque fait la fête, les croyants sont en deuil

Mais quelle fête ce jour-là à Lubumbashi ! C’était plein de monde ! On aurait dit un derby de football. Sauf que ce dimanche 4 février 2018, c’était plutôt un évêque qui célébrait ses 25 ans d’épiscopat, Monseigneur Jean-Pierre Tafunga, archevêque métropolitain de Lubumbashi.

Un évêque est un pasteur par excellence, d’après la doctrine catholique. Les prêtres de son diocèse œuvrent et contribuent à réaliser son ministère. Quand il est malade, ses ouailles le sont aussi. Il va mieux, alors c’est la joie. Voilà le sens de la fête de Lubumbashi. Mais posons-nous des questions, à mon sens, très sérieuses. Combien coûte une telle célébration qui a réuni des membres du gouvernement, des institutions nationales et provinciales ? Et ces évêques ou leurs représentants de toute la RDC à qui l’Église doit avoir payé les titres de voyage ? Combien cette fête a-t-elle coûté aux chrétiens qui y ont contribué, fut-il avec 1 dollar ? Combien le gouvernement a-t-il apporté à cette célébration ?

Je me demande aussi, quel que soit le coût total, si les milliers de dollars dépensés n’auraient pas dû être investis dans un projet de charité, solide, au profit des plus pauvres. Que gagnerait alors une Église qui prêche l’amour à une population qu’elle connaît pauvre ? Cette Église qui critique le pouvoir de ne pas faire assez pour le bien-être social de sa population.

L’Église qui pleure, l’Eglise en fête !

Sans doute, l’Eglise catholique reste la confession religieuse inégalée de la RDC, en terme d’œuvres au profit des masses, et cela sans distinction d’orientations politiques ou religieuses. Mais faut-il s’arrêter à cela seulement ? Je pense pour ma part que les 25 ans de l’épiscopat d’un évêque, fût-il Tafunga ou un autre, aurait un sens plus charitable s’il léguait une œuvre mémorable. D’autant plus que Tafunga va bientôt prendre sa retraite.

Il y a dans cette fête un goût très amer. L’Église catholique venait de compter des morts, à Kinshasa, et des blessés jusqu’à Lubumbashi, des victimes de la répression politique. Des chrétiens qui demandaient des assurances au président Kabila pour que les élections attendues aient lieu comme promis, et sans lui comme candidat. Ce discours traduit l’aspiration des Congolais pour des lendemains justes et pacifiques, dans tous les sens du terme. Malheureusement, Lubumbashi est resté sans voix, ou presque. Pourtant, dans cette ville, les forces armées ont par deux fois réprimé des manifestants devant la basilique Sainte-Marie, dans la commune de Kenya. Je n’ai pas entendu l’archevêque Tafunga élever sa voix pour défendre ses ouailles.

La peur de voir le gouvernement interdire le jubilé ?

Plusieurs analyses tendent à justifier ce silence comme une stratégie visant à ménager la chèvre et le chou. L’Église de Lubumbashi craignait que le pouvoir n’interdise cette grande célébration, si l’évêque Tafunga devait le critiquer sur les violences qui ont eu lieu dans la ville. Mais il ne faut pas non plus attendre qu’il le fasse après, si cette célébration peut être vue comme une faveur, dans cette ville où « toutes les manifestations publiques sont interdites » par la mairie.

Soit ! Mais que gagnerait alors un pasteur ? Que ses brebis soient protégées ? Qu’il soit célébré ? Je reste convaincu que la célébration de dimanche à Lubumbashi est très maladroite. J’ai honte de mon Église.

 


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Les commentaires récents (1)

  1. Un bel article, l’audace de la plume…
    J’apprécie a sa juste valeur cette réflexion cependant je trouve le fait qu’il y ait un acharnement sur la personne de monseigneur Tafunga par le fait qu’il ait fêté ses vingt ans d’épiscopat.
    ne nous arrive -t-il pas de fêter quand nos voisins sont en pleurs?
    il s’agit d’une messe d’action par laquelle nos joies et nos pleurs sont confiées a Dieu.
    la participation des chrétiens à cette célébration prouve leur attachement et le sens de la prise en charge matérielle de l’église que leur lègue monseigneur jean pierre Tafunga Mbayo