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Radio rumeurs internationale, émettant de Mbujimayi

En RDC, les informations ne sont pas que des faits et des évènements qui surviennent. On les invente aussi, on les manipule, et souvent on les déforme. Ça part de la rue et ça se déverse sur les réseaux sociaux. À Mbujimayi par exemple, la rumeur c’est tout un média, toute une radio.

Ce qui est grave c’est que la rumeur est parfois beaucoup plus consommée que la vraie information. Vous aurez beau démontrer les faits d’une information réelle, quelqu’un vous contredira 10 000 fois en face, vous taxant de menteur, car ce que vous dites n’est pas conforme à la rumeur qu’il a déjà consommée.

Dès le matin, on discute sur le trottoir. Et souvent de la politique : « Kabila a dit, Tshisekedi a fait, Obama était, Macron a dit… » Souvent ce sont des mensonges. Beaucoup de ceux qui discutent ne lisent pas, n’écoutent pas la radio et ne cherchent jamais la vraie information.

La rumeur, ça parcourt la ville en une minute

J’ai constaté que même les personnes instruites gobent facilement des murmures, surtout si c’est quelque chose de terrifant. Par exemple, une rumeur a circulé selon laquelle, « pour créer une crise alimentaire à Mbujimayi, l’ancien gouverneur Ngoyi Kasanji a largué des gens pour acheter tout  le maïs qu’il y a dans la ville et aller le jeter dans la rivière ». Ce qui était totalement faux.

A chaque fois c’est toujours : « On a dit que… », « On a entendu que »… Donc, des on-dit. Et en une minute, toute la ville en parle. Ça se raconte à bord de tous les bus, sur toutes les motos-taxis…

Des sources d’information à couper le souffle

Les plus grandes sources de rumeurs c’est bien sûr la rue, les réseaux sociaux, mais aussi les marchés, les bars et les lieux de deuil. Parfois, ce sont les médias traditionnels peu professionnels qui relaient la rumeur, avant de venir rectifier, mais sans s’excuser.

Dans les lieux de deuil, c’est pire. Je parle des deuils tels qu’on les organise au village, quand les gens sont déjà ivres de vin de palme. Un jour, aux funérailles de l’oncle d’un ami, j’en ai entendu des choses sur comment soigner la maladie à virus Ebola. Je ne veux pas les mentionner ici de peur de les relayer indirectement. Mais c’était un tel tissu de mensonges ! Des croyances sans tête ni queue.

Il y a quelques semaines, une rumeur a fait croire que la chanteuse Mbilia Bel est décédée. Beaucoup y ont cru et lançaient même des messages de condoléances, alors que c’était une fake news amplifiée par la rumeur et les réseaux sociaux.

La rumeur au village

Entre le temps où une vraie information est émise par une source à Kinshasa et le temps où elle arrive dans nos villages, il y a parfois 2.000 km. L’information arrive toute déformée. Un jour, j’ai posé une question à une femme pour savoir comment elle faisait pour s’informer sur la politique du pays et tout. À ma grande surprise, elle me répond : « J’apprends beaucoup de choses quand je vais au marché. Hier, on m’a dit que Tshisekedi est hospitalisé en Chine… »

Au dernier trimestre de 2019 à Mbujimayi, le maïs augmentait de prix sans raisons valables. Jusqu’à 8000 francs la mesure. La population se plaignait du coût trop élevé de la vie. Et quand on posait la question aux vendeurs de maïs, ils disaient : « On a dit que les taxes ont augmenté ! » Et c’était des rumeurs. Quelqu’un les fabriquait quelque part.

Bref, les fake news font de gros dégâts parmi la population. Peut-on fermer cette radio rumeurs internationale ?

 

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