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« Le retour des fantômes », une autre façon de réclamer les restes humains pillés pendant la colonisation

La ville de Lubumbashi accueille pour la première fois un théâtre musical dénommé The Ghosts are returning (Le retour des fantômes). L’événement a lieu du 10 au 11 février 2023 au bâtiment du 30 juin.

The Ghosts are returning est une œuvre conçue par Group50:50. Il s’agit d’un collectif d’artistes de RDC, de Suisse et d’Allemagne. Ils réalisent et produisent des projets de coopération artistique transnationaux. Selon Michal Disanka, membre du collectif, la pièce part « de l’histoire d’un médecin suisse qui, en 1952, ramena chez lui les restes de sept pygmées tirés de leurs sépultures dans la province du Haut-Uélé, pour permettre à l’Université de Genève de s’en servir dans ses recherches ». Un acte « abominable » qui, aux yeux de beaucoup de Lushois (habitants de Lubumbashi), devrait ouvrir la voie à un procès de la colonisation dont les stigmates sont encore présents dans la mémoire collective.

Si pour Disanka « c’est une occasion de faire un requiem, un long requiem pour nos morts avec un vrai lusanzu, rite pratiqué chez les Luba du Kasaï et qui consiste à faire une déclaration aux esprits en vue d’un éventuel règlement de conflit », le musicien suisse Elia Rediger est fasciné par le fait que la pièce « arrive à parler à tout le monde ». Pour lui, cela appelle « à une rencontre sur l’humanité, malgré la diversité de pensées dans l’abord de la question ».

Un voyage d’exploration qui ne laisse pas indifférent

Dans cette aventure, Group50:50 n’a ménagé aucun effort. « Nous sommes partis jusqu’à Wamba, à la rencontre des Mbuti, un peuple aujourd’hui menacé d’extinction à cause du système d’exploitation coloniale actuel, pour des discussions sur ce qu’il faut faire des squelettes emportés », expliquent les membres du collectif. Et de poursuivre : « Pour les Mbuti, il faut non seulement ramener les squelettes dans leurs terres, mais aussi ramener avec eux, leurs esprits et autres artefacts spoliés ! »

Le drame de la colonisation dérange Franck Moka, artiste du collectif, qui lui n’a pas fait le déplacement de Wamba. Il le fait savoir quand il parle d’une « hiérarchisation incompréhensible de personnes humaines », avant de conclure en ces termes : « Les images et autres vidéos de Wamba interpellent. Elles interrogent, posent une question fondamentale : c’est quoi être un être humain aujourd’hui ? »

A l’Université de Lubumbashi, le sujet fait l’objet d’un colloque international dont le but est de créer une commission mixte chargée, comme on peut l’imaginer, de faire avancer les discussions sur « la restitution du patrimoine culturel africain et le rapatriement des restes humains ».

En mettant en scène l’histoire de sept squelettes exhumés puis emportés en Europe que les véritables propriétaires réclament, Group50:50 se sert de la bonne manière, du pouvoir qu’ont les arts, dans leur capacité à faire bouger les lignes. Oui, parce que ce n’est qu’en parlant que l’on arrivera à signer la fin du temps de déni dans la restitution d’objets et d’œuvres d’art pillés !

 

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