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Ces vendeurs de journaux et de fake news à Lubumbashi !

Si vous habitez à Lubumbashi, vous connaissez sûrement ces attroupements quotidiens autour des vendeurs improvisés des journaux. Une impression de grands consommateurs de la presse. Pourtant, généralement tout n’est que curiosité. Et la cause est connue : les titres pompeux souvent sans contenu, faits justement pour « taper à l’œil ».

Il s’agit de ces journaux, plutôt leurs copies, étalés à même le sol et proposés à vil prix à des coins de rues. Des espaces de propagation des fausses informations alimentées par des rédacteurs sans scrupule devenus manipulateurs de l’opinion. Et c’est facile dans une ville sans kiosque pour la presse professionnelle.

La désinformation à moins cher       

Ce sont de véritables boites à rumeur et à polémique. Aux yeux d’un averti, ces papiers retenus ensemble grâce à un coup d’agrafe dans un coin, ne devraient pas s’appeler « journaux ». Car en effet, un journal devrait avoir une identité, un répondant, une adresse physique, une équipe éditoriale, etc. Ce qui manque à ces prétendus journaux vendus dans les rues de Lubumbashi. Au même moment, les « vrais journaux » n’ont plus de marché.

Un gros titre, parfois quelques gros mots, des tournures indigestes et des informations décomposées ou recomposées. Un maquillage qui donne l’impression de vrai. Et à seulement 200 francs congolais la pièce (près de 0,12$ à ce jour), ces papiers attirent autant qu’ils repoussent facilement. Le plus ironique du monde c’est qu’ils sont, généralement, des pages Web imprimées la veille.

C’est sûrement à cela que pensait Lunda Bululu en son temps, parlant de la presse et de ses dérives. Cet ancien Premier ministre de l’époque du président Mobutu dénonçait « des titres grandiloquents au contenu sablonneux ». Une critique plutôt acerbe contre les journaux qui n’impressionnent que par la formulation des titres de leurs articles.

La pratique est toujours d’actualité à Lubumbashi, et même gravement encore à Kinshasa. Car les gros titres attirent et font vendre, explique André Tshilumba, un lecteur de circonstance. Selon lui, et je le crois, « les concepteurs de ce type de journaux savent que le Congolais aime le sensationnel et quand c’est politique, ça passe bien ».

Des journaux de fakenews

Malheureusement, la déformation de l’actualité est le propre de ces journaux. Tantôt l’information est inventée et présentée telle une réflexion d’un rédacteur inconnu. Tantôt, c’est une information réelle dans une présentation tordue visiblement de manière délibérée. Le but serait plus d’attirer d’éventuels clients parmi les friands du sensationnel que d’informer. « Ils [les rédacteurs] nous prennent pour des marionnettes manipulables, explique Tshilumba. Mais quand on les a lus une ou deux fois, on change de regard sur leurs offres. Sauf si on est de la catégorie des clients recherchés, incapables de distinguer le vrai du faux ».

En effet, le meilleur effort de ces journaux est la reproduction des contenus d’autres médias. Sinon, ils s’en inspireront pour produire des informations proches de la réalité mais dont la re-formulation dénature souvent le sens. Et comme on peut s’en douter, plusieurs esprits tombent dans le piège.

Lisez la vraie presse, fuyez la « presse-poubelle » !

Depuis de longues années, Lubumbashi est pourtant réputé fournisseur de journalistes de qualité à la RDC. L’histoire en est témoin. Mais la même ville entretient plusieurs déviations qui font croire que le journalisme est un métier facile où n’importe qui aurait sa place. C’est cette conviction qui attire cancres et thuriféraires qui dénaturent la profession du journaliste.

Or, « le journalisme n’est pas un asile des cancres ». Mais Lubumbashi, ville où presque personne ne cherche plus à s’acheter un journal, est devenu un terrain propice aux vendeurs de rêves, de mensonges et de désinformation.

Les informations tordues en partie ou en entier ne peuvent que favoriser l’émergence d’opinions erronées. On le voit dans les discussions notamment sur la politique du pays. Tout le monde croit tout savoir pour avoir lu ces journaux montés de toute pièce. Entre-temps, la vraie presse n’a pas de clients.

Cette presse de circonstance devrait disparaître. Même si elle contribue à la construction d’une certaine opinion. Même si c’est la faute de la presse professionnelle qui ne se bat pas assez pour être à la première place.

 

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Les commentaires récents (4)

  1. L’article est bien rédigé. Je trouves qu’il est toujours important à nous journalistes de bien faire notre travail. Avant qu’on nous respect nous devons nous faire respecter en faisant bien notre boulot surtout que le terrain est rempli des moutons noirs et fakenews

  2. Il y a lieu de jeter des fleurs à l’auteur de cet article, qui nous tire d’un profond sommeil. Qui parmi nous ne s’est jamais arrêté place de la Poste sinon pour acheter ces journaux bon marché, du moins pour en dévorer les gros titres si accrochants ? Je salue à son juste titre cette mission salutaire.