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Drame de Kalehe: l’effroi puis les critiques

Dans l’Est de la République démocratique du Congo, le bilan des inondations ne cesse de s’alourdir. Et des voix s’élèvent pour dénoncer le manque d’actions politiques…

En évolution inexorable, les chiffres donnent le tournis aux observateurs, comme si ces derniers étaient eux-mêmes pris dans les tourbillons des eaux mortifères. Après les pluies diluviennes du jeudi 4 mai, dans le Sud-Kivu, les inondations et glissements de terrain induits ont fait au moins 400 morts dans cette région de Kalehe. Des personnes sont toujours portées disparues. Des villages submergés par les rivières sorties de leur lit, des maisons emportées, des champs dévastés… 

Un acharnement du destin ?

En plus du deuil effroyable de pertes aussi nombreuses, les habitants de la région sont étreints par trois sentiments. Le premier est l’impression d’un acharnement du destin, tant les populations du Sud-Kivu subissent, depuis des années, des violences récurrentes liées aux conflits armés. Le second est l’impression que les aides –notamment publiques– sont lentes et timorées, depuis les inondations. 

Certes, Kinshasa a décrété une larmoyante journée de deuil national, lundi 8 mai. Certes, le gouvernement provincial a fourni un bateau rempli de vivres, de bâches et de médicaments. Certes, le dernier conseil des ministres a annoncé l’envoi d’une « mission gouvernementale pour appuyer le gouvernement provincial ». Certes, Médecins sans frontières (MSF) a dépêché une équipe d’urgence sur place, samedi dernier. Et certes, la force onusienne de la Monusco s’est déclarée pleinement mobilisée avec tout le système des Nations Unies. Mais les aides restent encore insuffisantes, au vu du nombre des victimes, décédées mais aussi blessées…

Ce drame était prévisible

Le troisième sentiment qui étreint les observateurs est l’impression, voire la certitude, que la tragédie était évitable. C’est le secrétaire général de l’ONU qui, le premier, a tenu à relier les inondations à un phénomène désormais bien connu et anticipé. Antonio Guterres évoquait, samedi, « l’accélération du changement climatique et ses conséquences dramatiques », de surcroît dans « des pays qui ne sont pas en cause dans le réchauffement mondial » de la planète. Les inondations sud-africaines de 2022 ou rwandaises, deux jours avant la RDC, étaient autant de signaux. 

Et les scientifiques d’enfoncer le clou. Pour le géographe Birembano Bahati, enseignant à l’Institut supérieur pédagogique de Bukavu, dans le même Sud-Kivu, « la catastrophe naturelle qui a frappé le territoire de Kalehe était bel et bien prévisible et même évitable ». Il y a déjà une décennie, un rapport sur l’écosystème avait décrit le danger qui guettait les habitants de cette partie de la RDC. Il esquissait des mesures de nature à éviter le drame de ces derniers jours, notamment la délocalisation des populations concernées et le reboisement de collines martyrisées par les fortes pressions démographiques. 

Un réaménagement du territoire que la volonté politique peine manifestement à mettre en œuvre. Limite des moyens budgétaires ou excès de priorité dans un pays où la violence continue de compromettre le processus démocratique ?

 

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