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Kinshasa : ces élèves qui paient des gens pour se faire passer pour leurs parents

A Kinshasa, il est devenu coutume pour des élèves en uniforme bleu et blanc, qui ont été chassés de classe – et à qui il est demandé de se présenter avec leurs parents – de racoler des passants dans la rue pour jouer les parents de substitution devant les autorités des établissements scolaires. Ces parents de circonstance sont ainsi sollicités moyennant quelques billets de banque. Cette supercherie prend de l’ampleur et passe dans la plupart des cas sans que l’école ne s’en aperçoive.

Différentes raisons motivent ce comportement remarqué chez certains élèves. Il y en a qui ont peur que leurs vrais parents ne soient au courant de leur mauvaise conduite à l’école et donc qu’ils les grondent ou les punissent. D’autres par contre ont des parents trop pris à d’autres charges et n’ont pas le temps de répondre à une invitation de l’école. Ce qui suscite beaucoup d’interrogations, c’est la naïveté des écoles qui se font régulièrement prendre au piège des scenarios savamment orchestrés par les élèves.

Vous les avez peut-être déjà rencontrés, ces jeunes élèves aux visages inquiets qui, pendant que les cours se donnent en classe, errent dans les rues cherchant qui engager pour aller les défendre auprès des responsables scolaires. Ils abordent les passants et autres marchands le long des rues, pourvu que ceux-ci aient l’air responsable pour jouer le rôle des parents.

Le service rendu n’est pas gratuit, c’est du donnant-donnant. Dans la ville de Kinshasa où le chômage frappe presque tout le monde, les passants sollicités ne peuvent laisser passer une occasion de gagner quelques francs congolais. Voilà comment la corruption commence dès le bas âge parmi les plus jeunes qui croient tout avoir par la seule force de l’argent.

L’arnaque est parfois démasquée

Si très souvent cette arnaque passe inaperçue, il arrive des fois qu’elle soit démasquée. C’est ce qui est arrivé au jeune Diego, élève en 6e année du secondaire en biochimie dans une école  de la capitale. Il a été exclu temporairement pour harcèlement et attouchements sexuels sur une de ses camarades de classe. Pour cela, l’élève Diego a été sommé de se présenter avec son tuteur ou un de ses parents. Vu la gravité des faits, le jeune homme de 17 ans a évité d’en parler à ses parents. Il a plutôt payé un passant pour se tirer d’affaire devant le comité de discipline de son école.

Après avoir écouté la version des faits exposée par le directeur de discipline, le père de circonstance, tout furieux, a osé gifler l’écolier fautif comme pour le corriger. Mais ce dernier n’a pas pu se contenir face à la violence de cette gifle. Il déclarera sur le champ : « Tu te prends pour mon père ? Zongisela nga mbongo na nga [rends-moi mon argent] ». Le garçon s’est mis à rouer de coups le pauvre parent improvisé. Ce qui donna lieu à une véritable rixe dans le bureau du directeur de discipline. C’est finalement au commissariat de police que la vérité a éclaté autour du deal sordide passé entre les deux protagonistes.

La montée sans cesse croissante de ces actes dans notre ville laisse apparaître en filigrane l’énorme fossé communicationnel qui sépare tuteurs d’élèves et écoles, principaux acteurs dans l’encadrement des élèves. Outre l’absence de vérification stricte de l’identité de ces gens qui accompagnent les élèves après convocation, on note une quasi-absence de communication directe et permanente entre parents d’élèves et écoles. Non seulement l’école n’informe pas suffisamment sur la conduite de l’élève, mais aussi très peu de parents exercent un suivi régulier de la vie scolaire de leurs progénitures. Ce vide laisse la place à ce phénomène que nous décrions aujourd’hui. Un effort devra être conjugué pour éradiquer ce phénomène au sein de nos établissements scolaires en améliorant la communication entre école et parents.

 


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