Un tribunal de paix au Kasaï-Oriental
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Kasaï-Oriental : cinq territoires, deux magistrats !

L’accès à la justice est encore un luxe au Kasaï-Oriental. Excepté dans la ville de Mbujimayi, les magistrats font cruellement défaut dans les tribunaux de la province. Deux magistrats seulement pour cinq juridictions, c’est plus qu’insuffisant. Des centaines de dossiers moisissent, et des détenus croupissent dans des cachots attendant désespérément de connaitre leur sort.

C’est le Réseau de protection et de défense des droits des victimes et des témoins qui a révélé cette triste réalité du Kasaï-Oriental. Cette ONG a fait un constat déplorable du secteur de la justice dans les territoires de Katanda, Tshilenge, Kabeya Kamwanga, Lupatapata et Miabi. Donc, tout l’ancien district de Tshilenge, n’a que deux magistrats, notamment : le procureur de la République lui-même, ainsi qu’un seul magistrat permanent basé seulement à Tshilenge. « Dans ces conditions, comment les justiciables peuvent-ils faire valoir leur droit ? », se demande maitre Jimmy Bashile, coordonnateur du réseau susmentionné. Je me joins à lui pour dénoncer cet état de choses.

Attendre une année pour voir un magistrat

Le manque de juges contraint le magistrat basé à Tshilenge à faire le tour des tous les tribunaux de paix de 5 territoires. Un travail pénible quand on connait la distance séparant les tribunaux ainsi que la précarité caractérisant le secteur judiciaire congolais. Certains tribunaux peuvent attendre une année pour voir un magistrat. « Au tribunal de paix de Katanda, le dernier jugement a été prononcé l’année dernière. Et depuis, plus de 100 dossiers sont en souffrance faute de magistrats », affirme maitre Jimmy Bashile.

La situation est la même dans toutes les autres juridictions. Des centaines de personnes attendent le passage du fameux magistrat pour traiter leurs dossiers. C’est inacceptable. Au lieu de se rapprocher des justiciables, la justice s’en éloigne davantage. En plus, l’amoncèlement  des dossiers ne garantit pas leur meilleur traitement. Confronté aux mauvaises conditions de travail, le juge voudra bien traiter avec célérité toutes les affaires, au risque de commettre des erreurs matérielles ou de fond.

Les OPJ remplacent les tribunaux

La carence de magistrats ouvre aussi la voie aux violations des droits de l’homme. Dans certaines juridictions, les OPJ sont devenus de petits dieux. Ils instruisent, jugent et tranchent les différends entre citoyens en violation flagrante des lois du pays. Le délai légal de la garde-à-vue n’est pas respecté, idem pour la dignité des détenus. Dans un Etat de droit, ces pratiques illégales doivent cesser. C’est en revalorisant notre justice que nous pourrons aussi élever notre nation.

Les juridictions de cinq territoires du Kasaï-Oriental sont pourtant bien pourvues de magistrats. Mais ces derniers  ont presque tous déserté leurs lieux d’affectation. Maitre Jimmy Bashile charge les autorités : « Il y a des magistrats affectés mais qui ne veulent pas travailler. Ils préfèrent rester à Kinshasa touchant tranquillement leurs salaires. Cette pratique est encouragée par les autorités qui ne font aucun suivi de leurs décisions. »

Devenu tristement célèbre à cause de ses sanglants conflits fonciers et de pouvoir coutumier, Katanda est l’un des territoires qui ne peuvent en aucun moment se passer d’instances judiciaires. Je pense que la justice a un rôle à jouer pour le maintien de la paix et le règlement pacifique des litiges dans ce territoire.

Tout congolais a droit à la justice. En ville ou dans un coin reculé, tous doivent y avoir accès. Et l’Etat congolais est appelé à y veiller. La justice consolide la paix, la démocratie et l’Etat de droit.

 

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