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Pauvres populistes congolais ! A quelle urgence répond la loi Mbau ? (Partie 2)

Dans mon procèdent blog sur la loi Mbau qui déchaîne les passions entre Congolais au sujet de la dot, j’ai relevé le fait que l’urgence pour les futurs mariés, en contexte de pauvreté et de manque d’emploi, n’est pas de payer une dot plus faible. Bien sûr, il est important que l’Etat régule le secteur du mariage, pour éviter les extravagances en actuelles. Sur ce point-là, une loi se justifie. Mais encore faudra-t-il qu’elle soit plus juste, plus mesurée et en phase avec les réalités socio-culturelles très diverses de la RDC.

En posant la question : « A quelles urgences, sur le plan social, répond le projet de loi sur la dot en RDC ? », je ne cache pas mon indignation et ma surprise. Surprise de voir des parlementaires se délecter de jouer sur les passions de leurs compatriotes plutôt que de s’attaquer à de vrais problèmes auxquelles de vraies solutions amélioreraient le vécu quotidien de la population.

Ce que nous renseignent les pratiques au village

Je crois très sincèrement que les futurs mariés ont besoin d’assurance qu’ils sauront bien tenir leurs foyers. S’ils peuvent payer la dot, ce n’est pas toujours évident qu’ils sauront prendre correctement en charge les besoins de leurs maisons. Puisqu’en réalité, dans plusieurs coutumes de la RDC, la dot est souvent payée grâce aux contributions de nombreuses personnes, parmi lesquelles les parents et les amis. Le marié sollicite, surtout en ville, de l’aide de plusieurs. Et, en milieux ruraux, les parents ressentent toujours l’obligation d’épouser pour leurs fils.

Ce qu’il faudrait plutôt considérer, à mon avis, c’est justement cette pratique traditionnelle qui consiste à évaluer les capacités des futurs mariés à s’occuper d’eux-mêmes et des autres. Par exemple, dans la contrée où sont nés mes parents, dans le Lualaba, le futur marié doit avoir appris à cultiver et à gérer ses récoltes. Il doit avoir bâti sa maison, avant d’épouser. Avec les influences que les villages obtiennent de la ville, les futurs mariés doivent achever leurs cycles d’études secondaires ou supérieures.

Les futures mariées, elles, ont aussi achevé leur formation scolaire ou supérieure (universitaire). Surtout, elles doivent avoir acquis les capacités de produire elles aussi de quoi manger, la pêche par exemple. Elles doivent également apprendre à gérer leurs propres enfants, à cultiver un champ, etc.

L’Etat social devrait s’occuper des foyers et des futurs mariés

Ces exemples tirés du quotidien des villageois comme moi enseignent à plusieurs points de vue. D’abord, que la société organise socialement et culturellement le mariage. Aussi, ceux qui ont le pouvoir sur les futurs mariés s’assurent qu’ils ont les outils pour tenir le foyer. Arrêtons-nous donc ici, pour l’instant.

Ceci implique, au niveau de l’Etat social, de veiller sur ce qui, à la base, va permettre aux mariés d’être heureux. Ce n’est pas une loi, faite de textes et de papiers, et qui sera promulguée en français et pas assez vulgarisée partout, qui changera les choses. Les vraies lois s’inscrivent dans les cœurs des gens et s’appliquent aisément. Il ne faudrait surtout pas oublier que le Congo a un sérieux problème avec le respect de ses propres lois. Qu’est-ce qui va rassurer qu’une telle loi, que des parents et des filles contestent d’ailleurs avant même de naître, changera les choses ?

J’aimerais vraiment que nos élus usent d’un peu plus de bon sens que de manipulations et d’émotions. C’est ridicule de procéder de la sorte. Qu’on se le dise clairement : il y a nécessité qu’une loi régule le domaine de la dot. Hélas, jusqu’ici on semble assister plutôt à de la farce et non aux changements souhaités.

 

 

 

« Cet article est écrit avec l’appui technique d’Internews, grâce au financement de la coopération suédoise, l’USAID et la coopération suisse.  Les opinions partagées dans cet article ne reflètent pas nécessairement les vues de l’Agence Suédoise de Développement International (ASDI), de l’USAID, la coopération suisse, ainsi que des gouvernements suédois, des États-Unis et suisse. »

 

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