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Banalisation de la violence : il faut des psys pour soigner le Congo

À Kinshasa, le 30 novembre 2022, la toile partage une horreur : 11 enfants en rupture familiale ont échappé à la mort, mais pas au pire. Une bande rivale de Bandalungwa, une commune de la capitale, les a brulés à l’aide d’essence. Des brûlures du premier degré. Heureusement, les victimes ont eu la vie sauve. 

Comment expliquer une telle violence? Je pense qu’il faut un traitement massif de la mentalité de nombreux Congolais, sinon de la société entière. Je soutiens ici qu’il est nécessaire que des psychologues s’occupent de la société entière. A commencer par les dirigeants, jusqu’au plus petit des membres de la communauté nationale.

La pauvreté, une violence systémique

Il faut reconnaître que les conséquences des 25 ans de guerre que subit le Congo apparaissent maintenant de plus en plus. On a réussi à banaliser la violence physique et morale. C’est la faute de tous, à commencer par l’Etat.

La pauvreté ne cesse de grandir en RDC. Elle violente la masse. Si elle était une personne, la pauvreté aurait aujourd’hui 65 à 70 ans. Les choses ont commencé à se dégrader après l’indépendance en 1960. 

Si on convient avec la Banque mondiale que près de 70% des Congolais vivent dans une situation de pauvreté, force est de constater que cette pauvreté est systémique. Elle relève de l’incapacité des gouvernements successifs à améliorer les conditions de vie des populations. 

C’est donc une sorte de violence institutionnelle quand ceux qui dirigent sont responsables de l’absence d’eau pour tous, d’électricité, de soins de santé de qualité ou de logements décents. L’insécurité persistante s’inscrit dans cette logique.

La guerre jusque dans nos maisons, sur le corps humain

Depuis le génocide rwandais, et les guerres successives au Congo, les scènes de violences se sont portées jusque dans la ville, dans le quartier et dans la famille. La guerre va jusque sur le corps de femmes, et d’hommes d’ailleurs, eux aussi violés et violentés. Le viol, parfois de toute une famille, forçant les parents à l’inceste, sert à détruire le lien familial, à humilier. 

Des enfants qui voient massacrer leur famille, des bébés accrochés au sein de leurs mères inertes, sans vie après une fusillade ; des villes devenues des champs de bataille. Les images sont parfois innommables.

Ces scènes, répétées au fil des ans, sont devenues normales, tellement elles sont récurrentes. La psychologie l’a déjà démontré. A force de répéter un mensonge, on finit par s’y habituer, la normaliser et même la prendre pour une vérité. Il en est de même de la répétition de la violence.

Un policier bousille le pied d’un kuluna à Kinshasa, la toile exulte 

Il y a quelques mois, à Kinshasa, un policier a fait la une des conversations sur la toile. Dans une vidéo devenue virale, un kuluna, (délinquant en langage de Kinshasa), fonce sur un soldat armé. Tout le monde connaît la suite. Le soldat lui flanque une balle dans la jambe et les gens sont contents, sur les réseaux sociaux. L’Etat ne dit rien. 

Il y a des signes qui ne trompent jamais. La violence a élu domicile parmi nous. Elle est dans les cœurs, elle s’invite même à église, quand un prédicateur promet plus de bénédictions à ceux qui donnent plus d’offrandes et moins à ceux qui en donnent moins ou pas du tout. C’est une terreur psychologique. Les ravages de ces actes sont à vivre dans 20 ou 30 ans. Aujourd’hui, on assiste aux manifestations de ce qui s’est passé il y a deux décennies.

Ce n’est pas que la société congolaise soit par essence violente. Non. Ce serait un raccourci ridicule. Mais la vérité est-là.

Chacun de nous a un devoir

Je reconnais que beaucoup de Congolais militent en faveur de la paix, du rejet de la violence. Ainsi, lorsque des conducteurs de taxis motos tuent un homme qu’ils accusent de vol, la communauté se lève et exige un procès à Lubumbashi. Elle rappelle les violences perpétrées sur les routes de Lubumbashi et de Kinshasa. 

Cet exemple montre qu’il est possible de sortir de ce cycle de violences par la justice, par l’éducation. Mais, il me semble qu’il faille passer par la case psychologie. Il faut débannaliser la violence. Ainsi, grâce à une cure de psychologie, ou de psychanalyse, il sera facile de dire aux gens qu’il ne faut pas tuer celui qui est accusé d’un crime. Il faut plutôt le livrer à la police pour que justice soit faite. 

Dans tout cela, l’Etat a un rôle important à jouer. Mais cela ne dispense personne d’entre nous de ce devoir de non-violence et de civisme. 

 

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