Comment va le grand Kasaï après la guerre de Kamuina Nsapu ?

L’une des pires guerres de l’histoire du Kasaï s’est achevée voici près de deux ans : la guerre de Kamuina Nsapu. Je ne peux oublier les horreurs et les atrocités qui l’ont caractésée. Il y a eu des morts, des décapitations, des viols massifs… Oh, qu’une telle sale guerre ne revienne plus jamais ! Si je pouvais effacer son horrible souvenir de ma mémoire !

L’espace Kasaï a retrouvé sa paix légendaire après la terrible guerre de Kamuina Nsapu. Les brousses et les forêts qui étaient transformées en bastion des miliciens, sont libérées. On peut désormais voyager de Kananga à Tshimbulu (ex-épicentre de la rébellion Kamuina Nsapu), sans risquer sa vie. Certes, « il y a quelques poches résiduelles de miliciens à Dibaya et Demba, mais rien de grave », m’a dit un habitant de Kananga.

On peut désormais convoyer des marchandises de Mwene Ditu à Mbujimayi, de Miketa à Kabeya Kamwanga ou de Luebo à Tshikapa sans se faire égorger sur la route. Des miliciens continuent à se rendre aux autorités, avec armes et munitions.

Les jeunes peuvent désormais s’habiller en rouge, ils ne pouvaient le faire à l’époque, de peur d’être confondus aux miliciens, car le bandeau rouge était l’un des signes distinctifs des Kamuina Nsapu. Les administrateurs des territoires qui avaient fui leurs entités sont revenus… Vive la paix ! Mais cette guerre a laissé derrière elle ruines, veufs, veuves, orphelins et familles brisées. Aujourd’hui deux ans et quelques mois après, la région du Kasaï en porte encore les stigmates.

Des procès en cours et des enquêtes sans suite

La guerre de Kamuina Nsapu est celle qui a emporté deux experts de l’ONU – l’Américain Michael Sharp et la Suédoise Zaïda Catalan, sauvagement assassinés en brousse. Le procès sur cette affaire continue sans convaincre personne. Et je me moque du silence et des tergiversations de l’ONU. Ce conflit du Kasaï a révélé aussi de nombreuses fosses communes dont certaines comptaient plus de 80 morts. Jusque-là, nul ne sait ce que sont devenues les enquêtes qui ont été ouvertes à ce sujet. En tout cas, moi je sais qu’une enquête sur des crimes impliquant l’armée, ne peut aboutir en RDC.

Radio France internationale a révélé des vidéos des massacres dans cette guerre du Kasaï, mais justice n’a jamais été faite pour les victimes. On ne sait pas ce que sont devenues ces femmes réduites à l’esclavage sexuel par des miliciens pro gouvernement Bana Mura, même après la guerre ! Plus de 700 000 enfants frappés de malnutrition sévère. Le gouvernement peut-il nous dire aujourd’hui si leur situation s’est améliorée ?

Aujourd’hui, deux ans après, les instigateurs de cette guerre, qui étaient à l’époque au gouvernement, sont impunis et vaquent paisiblement à leurs occupations. Certains sont actuellement députés nationaux. Et je sais que ce dossier n’a aucune chance d’être évoqué par les dirigeants actuels, en raison d’un accord « d’impunité » FCC-Cach.

Bref, le silence des armes ne suffit pas au Kasaï. Nous voulons le décollage économique, les opportunités pour les jeunes, la justice, la fin de l’impunité… Tout cela manque cruellement dans notre province.