Le rêve des Congolais s’est réalisé. Pleine d’émotion, l’issue de ce match tendu a été « prédite » par le pouvoir. « Merci au président de la République pour son implication », assure alors, toute joyeuse, la commissaire adjointe du Haut-Katanga. Elle lui dédie également cette victoire. Pendant ce temps-là, à la télévision publique, on peut entendre que « cette victoire des Léopards est une victoire du chef de l’État, le premier sportif du pays. »
« Le porte-parole du gouvernement n’a pas manqué d’attribuer la performance des joueurs au chef de l’État. »
Pour assurer sa propagande, le pouvoir profite de cet évènement qui marque les esprits. En plus, tout ce qui plaît ou rassemble vient du pouvoir. « Je crois que c’est une victoire de Joseph Kabila…et c’est la deuxième fois sous son mandat », a déclaré à chaud Aubin Minaku, président de l’Assemblée nationale.
Pour sa part, Henri Mova, secrétaire général du parti présidentiel, le PPRD, surprend par son tweet : « Les Léopards donnent un troisième mandat à Kabila. » Le message a été retiré par l’auteur du compte qui a annoncé avoir été victime d’un piratage. Dans une émission sur la télévision publique, le porte-parole du gouvernement Lambert Mende n’a pas manqué d’attribuer la performance des joueurs au chef de l’État « lui qui a été au chevet des Léopards jusqu’au bout ».
Et si les Léopards avaient fait piètre figure ?
Trois buts en finale du CHAN face au Mali, la RDC est victorieuse pour la deuxième fois en quatre éditions. C’est une des rares fois où le peuple est uni. L’unité est chantée et la nation devient véritablement « une ». Les fauves congolais ont été « tellement brillants qu’ils ne pouvaient que marquer et gagner », commente un supporter congolais.
« Aujourd’hui, l’heure est au dialogue. Si seulement la victoire pouvait servir à quelque chose… »
Quel aurait été le regard de la nation sur son équipe si elle avait perdu ? « Certainement pas le même. On connaît notre pays. Ibenge en aurait sûrement eu pour son compte, et chaque joueur aurait eu son lot d’insultes. Nous ne sommes jamais ensemble dans l’échec. C’est sûr que l’opposition aurait aussi saisi cette opportunité pour tout attribuer au pouvoir », affirme un animateur sportif de la télévision publique à Lubumbashi.
Lorsqu’en demi-finale la RDC prenait le but égalisateur face à la Guinée, certains commençaient déjà à critiquer l’entraîneur des Léopards. Tout cela est oublié ; la RDC a gagné.
Aujourd’hui, l’heure est au dialogue national convoqué par le gouvernement. Si seulement la victoire pouvait servir à quelque chose… Les politiciens ont tout essayé. Certains n’ont pas manqué de baptiser le trophée du CHAN « la coupe du dialogue ». La fête passe vite, hélas ! Les politiques reviennent déjà à leurs moutons : les élections attendues fin 2016. D’ailleurs, l’opposition appelle à une journée ville morte ce 16 février.