Elle est l’une des quatre arbitres féminines du Haut-Katanga, mais la seule arbitre internationale de l’élite A. Elle est donc capable d’officier même en Coupe du monde. Cependant, lorsque dans certains matchs de football les supporters sont violents, Mireille Kanjinga Mujanayi craint pour sa vie.
Du karaté où elle s’essayait sur le dojo de son père qui est ceinture noire, la jeune femme d’une trentaine d’années s’est retrouvée sur les pelouses de football. Mireille Kanjinga aura passé sa jeunesse dans le monde du sport, tout comme ses frères.
Son aventure démarre dans l’équipe de football féminin DCMP Bikira (Bikira veut dire jeune fille, en swahili) à Lubumbashi. Mireille n’a que 16 ans. Le hasard a fait qu’elle s’entraîne dans l’équipe comme arbitre. Elle a arbitré des matchs des jeunes filles et des vétérans au foyer social de Katuba, une commune populaire de Lubumbashi où elle est née et a grandi. Ses premiers pas, elle les réalise aux côtés de Clémence Ngoy, une femme bien connue pour son engagement dans le football féminin, et qui deviendra en quelque sorte son mentor. « C’est là que ce goût d’arbitrer m’a collé à la peau », explique Mireille.
« J’ai vécu mes ratés »
Ce choix de devenir arbitre aura été l’un des plus gros défis de sa vie. « J’ai vécu mes ratés », se rappelle-t-elle. Par exemple, « arbitrer un match de football en Guinée » après l’échec à son tout premier test de recrutement d’arbitre. « J’ai été repêchée à la faveur de mon jeune âge », confie-t-elle.
Pire calvaire pour elle qui voulait déployer ses ailes en prenant cette option. La Fédération congolaise de football n’encourage pas assez les talents féminins. « J’étais découragée au point d’être sur le point de tout laisser tomber », avoue-t-elle.
Problème d’équité
La jeune arbitre doit faire preuve de patience et de détermination, car une fois la formation en poche rien n’est gagné. « J’ai passé quatre ans sur le banc de touche, sans être désignée pour officier un seul match de football », se souvient Mireille Kanjinga. « En football, si on est une femme, il faut se battre fort comme les hommes, user de sa grosse influence… Sinon tu ne montes pas sur le terrain ».
Aujourd’hui cheffe hiérarchique des arbitres de l’Entente de football du Haut-Katanga, Mireille est fière de son endurance. Elle est aussi étudiante et formatrice en éducation physique, avec cinq ans d’expérience d’arbitrage.
Un but refusé pour hors-jeu, et la clandestinité pour Kanjinga
Parmi ces expériences, elle n’oubliera jamais celle du 11 février 2018. Ce jour-là, alors qu’elle était arbitre latérale lors d’un derby TP Mazembe – FC Lupopo, deux éternels rivaux du football katangais, Mireille a refusé un but à Lupopo, pour « une position de hors-jeu ». Décision qui créera la furie chez les supporters des Cheminots qui s’en prendront même à sa famille.
Malgré tout, Mireille assume sa décision. « Je n’ai fait qu’appliquer les dix-sept lois de jeu mises à notre disposition par l’instance du football mondial, rien que ça », soutient-elle. Mireille Kanjinga vit aujourd’hui en clandestinité, craignant pour sa sécurité, mais ne veut pas abandonner.
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