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Prison de Kisangani : les détenus se sécurisent eux-mêmes

Incarcéré de décembre 2017 à janvier 2018 pour avoir protesté contre le report des élections, j’ai découvert avec effroi les énormes failles administratives de la prison centrale de Kisangani. Ce sont elles, en partie, qui obligent les détenus à s’organiser eux-mêmes pour leur survie.

Cette prison n’est pas épargnée par de mauvaises conditions de détention qui caractérisent le système pénitentiaire congolais. J’identifie ici deux principales conséquences néfastes qui découlent de la mauvaise administration de la prison centrale de Kisangani.

Des conditions hygiéniques extrêmement précaires  

La prison de Kisangani n’a pas d’infrastructures pouvant rendre les conditions hygiéniques plus humaines. Avec plus de 900 détenus, elle n’a que cinq latrines à l’intérieur de chaque dortoir. Ces latrines n’ont pas de fosses septiques ; ce sont des fûts qu’on utilise à la place. Chaque matin, les détenus eux-mêmes transportent ces fûts jusqu’aux terrasses dans lesquelles ils jettent les matières fécales après les avoir émiettées manuellement.

En plus, la promiscuité constitue un autre problème hygiénique majeur. Construite pour accueillir 35O personnes, la prison accueille le triple de sa population carcérale normale.

Dans un dortoir de 30m sur 10, on peut compter 80 détenus qui dorment sur le pavé, sans couverture ni moustiquaire.

Un climat de jungle qui couve l’insécurité      

Les détenus l’appellent « Zaïre », en opposition à la RDC pour traduire « le non-droit », la prison centrale de Kisangani est un monde à part entière. Les policiers commis à la garde, par exemple, ne piétinent même pas un seul centimètre de l’enceinte de la prison pour en assurer le contrôle.

Sauf dans les cas très rares de débordements ou des troubles, ils y entrent. Ainsi, l’absence de l’autorité pénitentiaire plante le décor de l’insécurité qui va des bagarres récurrentes entre les détenus, au vol des biens, en passant par des tentatives de meurtres et d’empoisonnement.

L’organisation interne des détenus, un remède partiel aux failles administratives

Pour réduire tant soit peu la précarité des conditions hygiéniques et juguler l’insécurité à l’intérieur de la prison, les détenus s’organisent eux-mêmes autour d’une structure chapeautée par le Kapita général (une sorte de chef de groupe).

La légitimité de son pouvoir est basée sur la peur que lui et ses hommes inspirent à chaque détenu dès son entrée. Un peu comme dans les fils hollywoodiens.

L’administration du Kapita général s’occupe de l’organisation des travaux d’assainissement de la cour et des locaux, de la gestion des effectifs des détenus, et du maintien de l’ordre pour réduire les risques d’affrontement entre les détenus. Il devient alors une sorte de méchant gentil grâce à qui la prison devient un enfer vivable.

Pourtant, cet ordre illégal qui règne à l’intérieur de la prison de Kisangani est source de plusieurs maux. J’y reviendrai prochainement dans un autre blog.

Pour le moment, la réforme du système pénitentiaire congolais, à commencer par la réorganisation administrative des prisons, est une urgence ! Car les prisons ne sont pas des mouroirs.

 

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Les commentaires récents (8)

  1. L’expérience que tu as vécue, on ne peut la souhaiter aux autres.

    Les conditions hygiéniques inhumaines à la limite de l’insupportable que tu as décrites et la problématique de promiscuité au sein des dortoirs de la prison centrale de Kisangani m’ont données froid au dos.

  2. L’expérience que tu as vécue, on ne peut la souhaiter aux autres.

    Les conditions hygiéniques inhumaines à la limite de l’insupportable que tu as décrites et la problématique de promiscuité au sein des dortoirs de la prison centrale de Kisangani m’ont données froid au dos.

  3. Il est déplorable d’apprendre toutes ces choses dans un État qui se dit démocratique.
    La prison est un lieu de rééducation avec toutes ces vérités… je me demande si réellement le gouvernement provincial agit pour l’amélioration des conditions dans cette prison centrale, qui risque de
    se transformerr en un centre de formation des délinquants aulieu de rééduquer les détenus.
    Cher Assistant le seul moyen de sortir de impasse est la prise de conscience collective.

  4. ouf! c’est pitoyable pour un grand Congo d’avoir ces sortes de centres pénitentiaires franchement! Espérons seulement que ceci est lu des autorités compétentes et qu’ils viendront éventuellement à la rescousse de ces détenus qui ont eux aussi droit à un bon traitement !!

  5. ouf! c’est pitoyable pour un grand Congo,d’avoir ces sortes des centres pénitentiaires qui laisse à désiré franchement!Espérons seulement que ceci est lu des autorités compétentes qui,éventuellement voudront venir à la rescousse de ces détenus qui ont eux aussi droit à un bon traitement…

  6. Attendre tout de l’état central ou provincial nous rendra limitatif. Que tous les corps sociaux s’impliquent pour bouger les lignes et améliorons les conditions de vie de nos pairs..