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Rencontrer un policier la nuit à Mbujimayi : mieux vaut courir vite

Le rapport du World internal security & police index (WISPI) sur la police congolaise, concernant l’année 2016, ne traduit pas à mon avis toute la réalité du comportement de notre police sur le terrain en RDC. Selon ce rapport, 30% des Congolais font confiance à la police congolaise la nuit. Ces chiffres me semblent un peu trop bons par rapport à la réalité. Dans une ville comme Mbujimayi, rencontrer des policiers la nuit, c’est affronter la mort et il faut se sauver.

La police congolaise est connue pour ses bavures et sa répression. Je ne connais pas un Congolais qui sorte dans la rue la nuit et qui se sente sécurisé par la police. Katy, un jeune de Mbujimayi raconte sa mésaventure nocturne : « C’était pendant la CAN de football Gabon 2017. On regardait le match sur un écran géant placé à côté du boulevard Laurent Désiré Kabila. La RDC venait de se faire éliminer cette nuit-là en quarts de finale. Après le match, je me suis mis en route pour rentrer à la maison, très déçu par la défaite des Léopards. J’ai rencontré des policiers marchant en file indienne. Ils ont tout de suite inventé une infraction contre moi en disant que j’avais ‘’osé passé à travers leur file indienne’’. Pour cela, ils m’ont ravi mes chaussures, ma ceinture et ma petite lampe torche de poche. Ils ont menacé de me tirer dessus lorsque j’ai tenté de protester. »

Pas tous pourris

Les autorités de la police et de l’armée fournissent d’énormes efforts pour réduire l’insécurité à Mbujimayi, hélas elle persiste en raison de l’existence de bandits communément appelés « suicidaires », mais aussi des brebis galeuses parmi les hommes de troupes. Dire que les policiers congolais n’ont pas bonne réputation n’est qu’un secret de polichinelle. Ce rapport du Wispi le démontre très clairement.

Les autorités elles-mêmes savent que des militaires et des policiers sont au nombre de ceux qui créent l’insécurité au sein de la population. La preuve, presque toutes les fois que des bandits armés sont arrêtés à Mbujimayi, parmi eux on compte souvent des hommes en uniforme. En témoignent, de nombreux procès organisés en audience publique où des bandits sont jugés sur la place de la mairie de Mbujimayi : parmi eux, des hommes œuvrant sous le drapeau. C’est ce que dénonce régulièrement le député provincial Cléophas Nyembwe Nyerere.

Des problèmes récurrents

Les cambriolages et les braquages d’hommes armés sont monnaie courante la nuit à Mbujimayi. Une situation amplifiée par le manque d’électricité dans certains quartiers. Les victimes identifient et reconnaissent leurs bourreaux par leur uniforme. Sur une radio locale, un pasteur raconte ce qui est arrivé une nuit à son église : « Il était 1 heure du matin. Des hommes en armes et en tenue de la police  ont fait irruption dans l’Église. Il y avait une fille d’environ 16 ans qui était là et qui priait. Ils l’ont violée dans l’Église. Quelle abomination ! Ensuite, ils ont emporté les biens de culte, mixeurs, synthétiseurs et autres… »

Un jour, un journaliste revenait de sa radio vers 21 heures et rentrait chez-lui après avoir présenté le journal de 20 heures. Il raconte : « Des gens armés et en uniforme de la police m’ont barré le passage et ont demandé mes pièces d’identité. Je leur ai dit que je suis journaliste et j’ai montré ma carte de presse. Ils ont crié tous ensemble: ‘’Journaliste ! C’est donc vous qui nous insultez à la radio’’. »

Ils l’ont arrêté en disant à leur chef : « Mon lieutenant, voici les gens qui nous insultent tout le temps à la radio et à la télévision. » Sur place juste à côté, il y avait cinq ou six autres civils assis à même le sol. « Ce sont ceux qui avaient été arrêtés avant moi. Ces hommes armés leur ont ravi argent, téléphones, montres, bracelets… » Et d’ajouter : « Après m’avoir retenu environ une demi heure, celui qui était leur chef est venu vers moi et leur a dit : ‘’Laissez partir le journaliste. Remettez-lui son téléphone’’. » Le journaliste affirme s’être éloigné de là à grandes enjambées pendant que les policiers lui criaient : « Imbécile ! Allez nous insulter encore à vos radios. »

À Mbujimayi, ça tire de partout presque toutes les nuits. Et on sait bien distinguer les bruits des armes de la police de ceux des calibres douze détenus par de nombreux habitants pour se protéger. Le matin, c’est une moisson de douilles de balles que nous ramassons…

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