La RDC vogue dans un manque de respect notoire. D’abord l’irrespect à l’égard d’Etienne Tshisekedi dont le décès fait l’objet des calculs politiciens. Mais aussi, l’irrespect à l’égard des engagements pris dans l’Accord de la Saint-Sylvestre censé ouvrir la transition devant déboucher sur une alternance pacifique.
Voici la revue de presse de Didier Makal.
« L’équation se complique avant le rapatriement », titre La Prospérité, journal de Kinshasa. Il note « deux nouvelles conditions ! » de l’UDPS, parti du défunt Etienne Tshisekedi. Il s’agit de fixer le lieu de l’inhumation, avec érection d’un mausolée, et de nommer un premier ministre comme le veut l’Accord sur la Transition.
La bataille de publicité sur le défunt Tshisekedi
Dans une autre information, La Prospérité constate simplement un « rapatriement bloqué », ce qui ne l’empêche pas cette critique : « Tel, dans un jeu de ping-pong, […], la nouvelle de sa mort a surpris plus qu’elle n’a eu l’effet d’une bombe, celle de son rapatriement devient, à tout le moins, un nouvel épisode, comme si l’on était dans une pièce de puzzle. »
Le Potentiel, autre média de Kinshasa, renvoie dos-à-dos « les uns et les autres », entendez pouvoir et opposition. Il rappelle des fondamentaux bantous : « Respects des morts », le deuil étant « un temps d’arrêt et ne laisse lieu à aucune inconduite. » Il n’accepte pas que la mort de Tshisekedi fasse l’objet d’un « marchandage ».
En effet, l’opposition espère obtenir l’application de l’Accord ; le pouvoir quant à lui vise à exploiter le vide causé par Tshisekedi pour affaiblir le Rassemblement. En attendant, la publicité sur les obsèques de l’opposant va bon train.
Sans équivoque, Le Potentiel considère que « Vouloir faire de la mort de Tshisekedi un sujet de calculs politiques, est un manque criant de respect à celui qui ne demande pas mieux que d’être accompagné tranquillement dans sa dernière demeure. »
Crainte du non-respect de l’Accord de la Saint Sylvestre
Sans aucun doute, les exigences de la famille politique de Tshisekedi visent à profiter de l’aura qui couvre encore le défunt. Mais aussi à obtenir le respect de l’Accord. Un accord que la Majorité présidentielle serait sur le point de renier : « la MP fait volte-face », titre Le Potentiel.
« Après avoir soulevé une polémique inutile sur les modalités de désignation du prochain Premier ministre, la MP ne s’avoue pas vaincue. Elle revient en force avec une nouvelle provocation : la présidence du CNSA ne devrait pas être attribuée « automatiquement » au prochain président du Comité des sages du Rassemblement. Habituée à violer les textes et les compromis, la MP met à nu sa mauvaise foi en remettant en cause les acquis de l’Accord de la Saint-Sylvestre. Une volte-face qui est loin de l’honorer », commente Le Potentiel.
Le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende s’est attiré les railleries des internautes à propos de cet Accord. Après la mort de Tshisekedi, en effet, « la question liée à la présidence du Conseil National de Suivi de l’accord doit être renégociée », aurait déclaré le ministre, selon le site d’information 7sur7.cd. Une bourde ou presque, qui pousse plusieurs personnes à considérer qu’il n’a jamais lu l’accord dont il parle. Car, en effet, selon cet accord, le président du Conseil de suivi est le président du comité des sages du Rassemblement de l’opposition, pas Tshisekedi. Et donc, pas besoin de redéfinir cette disposition.
La mort de Tshisekedi change tout
Oui, c’est « une mort qui change tout », la mort d’Etienne Tshisekedi, constate Afrik Arabia. Tout le monde veut tirer des profits politiques de cette mort, même le gouvernement qui redoute « que les cérémonies ne se transforment en manifestation politique ». D’où sa généreuse proposition -rejetée par l’UDPS- de s’occuper de toutes les charges des obsèques. Il ne reste qu’à compter des risques :
« La disparition de la figure tutélaire de l’opposition congolaise pourrait bien faire voler en éclat le maigre consensus qui s’est dégagé de l’accord de décembre. Du côté de la majorité présidentielle, on profite du décès de Tshisekedi pour remettre en cause la composition des membres du Conseil de suivi de l’accord (CNSA) que devait présider l’opposant historique », y compris pour le poste de premier ministre, précise Afrik Arabia.
Arrondir les angles et avancer
Enfin, il y a « nécessité d’arrondir les angles » devant tant d’adversité, conseille Forum des As. Le média kinois considère qu’on est là devant « une polémique dont on pouvait utilement se passer ». Et de poursuivre :
« Entre ces deux positions apparemment diamétralement opposées, il y a pourtant place à la conciliation. Car tout le monde est au moins d’avis qu’il faille enterrer dignement Etienne Tshisekedi. Ce, compte tenu de ce qu’a été l’homme », opposant politique, et ancien Premier ministre de la RDC.
C’est le vœu de nombreux Congolais qui voient déjà passer le temps utile pour finaliser les discussions. Ils se demandent à quand le début de la transition qui mettra un terme à toute cette crise. Surtout, la population silencieuse ne sait même pas à quoi servent ces querelles politiques.