Au gré des actualités, les chaines d’informations doivent combler et inviter de « bons clients qui coûtent moins chers que des reportages ». Ces chaines, Cnews, BFM, LCI aux publics confidentiels, dont le modèle économique repose entièrement sur le clash et la polémique, invitent des polémistes mais également des experts en guerre, sécurité ou économie afin d’apporter un éclairage.
La pandémie Covid-19 ou coronavirus, a vu se répandre sur les plateaux d’information toutes sortes de virologues, docteurs, épidémiologistes. L’audience aussi ignorante que les journalistes se voit dans l’obligation d’acquiescer, devant l’autorité de ces blouses blanches en costumes.
Des spécialistes à la réponse facile surgissent. Des experts à la phrase cinglante et lapidaire. De ceux qui peuvent mouliner en deux trois phrases, ce sur quoi d’autres ont bûché des années, voire toute une vie, sur des centaines de pages. Ces bardés de diplômes dont le dernier livre publié sera affiché à l’écran résument en quelques mots des problèmes qui de prime abord semblaient tout de même un peu plus complexes. Surtout et plus grave, sollicités en direct, ils débordent trop souvent de leur domaine d’étude, ou de leur zone de spécialité.
Fabriquer le vaccin en Occident, mais le tester en Afrique ?
Et l’autre soir sur LCI, on a eu droit à du très très bon client qui s’entretenait avec un autre très bon, lui aussi. Ce docteur au chevet des agonisants et ce laborantin l’œil rivé au microscope, sont certainement très fatigués de sorte qu’ils parviennent bien mal à contenir ce qui ressemble bien fort à une sorte de racisme.
L’émoi est mérité : Testons sur les populations africaines des vaccins bricolés car de toute façon leurs infrastructures sanitaires sont à la rue. Et puis n’avez-vous pas fait ça avec le Sida sur des prostituées ? Absolument !
Le point Godwin est atteint. Et certains vont se dépêcher de s’en emparer. A l’aguet d’aberrations prononcées à la télé. Ils capturent ces scènes, pour remplir leur réservoir de haine qui fait fructifier leur combat et susciter l’outrage chez chacun, qui partage sous le sceau l’émoticône rouge, la rage !
Et voici un autre acteur, peut-être liée au précédent. Bientôt apparaît un Jean-Paul Mira sur Twitter, un faux évidemment le vrai serait celui-ci… qui ne s’embarrasse plus de prévenir de provocations et qui affirme péremptoire ce que tous cherchent jour et nuit, ce fameux vaccin va être proposé aux populations d’Afrique, notamment d’Afrique de l’Ouest …
La capture, de ce tweet à cette heure disparu, encore plus rapide que la séquence télévisée, se propage aussi vite que la lumière se reverse dans des groupes WhatsApp, s’affiche sur les murs Facebook. Jean-Paul Mira est désormais une célébrité.
Il n’y a pas de vaccins
Tout cela pourrait prêter à rire, car pourquoi donc testerions nous un vaccin en Afrique alors que les morts s’empilent dans les morgues improvisées en Europe. A moins que certains pensent qu’il s’agisse de faux cercueils…
L’itinéraire de cette fake news alimente remarquablement les soupçons contre le « médecin blanc et ses vaccins » et le business des labos. Les cobayes d’Afrique, la chair à seringue va permettre de tester sans se soucier des « effets secondaires ». Les autorités locales non intéressées par le sort de leurs populations se laisseront acheter.
Chacun, de l’expert en aberrations, à la chaine d’infos productrices de clashes, au faux compte Jean Paul Mira, à celui qui partage sans penser… Chacun contribue derrière son écran à alimenter, susciter la méfiance envers un personnel soignant alors que la pandémie la plus grave de ce siècle est sur le point de frapper avec la plus grande férocité nos sociétés.
Pas de vaccin en RDC