Souvent, quand on est dans l’opposition, c’est facile de critiquer le bilan du pouvoir en place. Bien sûr, en cinq ans, Félix Tshisekedi a son bilan, négatif ou positif, c’est selon. Mais l’opposition qui aspire à diriger le pays un jour, a aussi un bilan à présenter aux Congolais. Comment s’est comportée l’opposition en cinq ans ? A-t-elle vraiment joué son rôle de contre-pouvoir ?
Il y a quelques jours, je parlais du bilan de Félix Tshisekedi. Aujourd’hui je dois donner mon avis sur celui de l’opposition. Ici, par « opposition », je n’entends pas un seul individu ni un seul leader politique. Je fais allusion à l’ensemble de partis, regroupements et leaders politiques de premier plan opposés au régime de Félix Tshisekedi. Comment se sont-ils comportés en cinq ans ?
Comment a été la gouvernance au sein de l’opposition ? Était-ce une gouvernance modèle ? Car, votre comportement en tant qu’opposant nous donne une idée de ce que vous ferez lorsque vous serez un jour au pouvoir.
Divisions, dislocations et opportunisme politique !
En cinq ans, l’opposition a brillé par des divisions et des querelles de positionnement et de leadership. Au départ, l’aile dure de l’opposition était incarnée par le groupe de Genève, à travers la plateforme Lamuka. Celle-ci comptait en son sein des poids lourds politiques tels que : Moïse Katumbi, Jean-Pierre Bemba, Martin Fayulu, Adolphe Muzito, etc.
Pourtant, moins de deux ans seulement après l’investiture de Félix Tshisekedi, Lamuka n’a pas tardé à se disloquer et à se vider de ses gros calibres. Les querelles intestines se sont multipliées. Matungulu est parti. Katumbi, Bemba et leurs députés ont rejoint la plateforme Union sacrée de Félix Tshisekedi. En d’autres termes, ils ont rejoint l’homme même dont ils disaient qu’il avait volé l’élection présidentielle du 30 décembre 2018. Leurs partis respectifs ont décroché des ministères importants au gouvernement Sama Lukonde. Cela fait partie du bilan de l’opposition.
Fayulu égal à lui-même !
Qu’on le veuille ou non, le seul opposant phare à rester constant dans ses positions face à Félix Tshisekedi pendant cinq ans, c’est Martin Fayulu. D’autres, comme Katumbi et Bemba, ont bel et bien participé à la gestion du pays avec le chef de l’État. Et ils en restent comptables ! N’en déplaise à leurs partisans. Jean-Pierre Bemba est aujourd’hui ministre de la Défense.
Fayulu a parcouru le monde pour pousser la communauté internationale à l’aider à reprendre son « pouvoir volé » par Félix Tshisekedi, mais sans succès. Dans ses meetings, on pouvait entendre ses partisans lancer des slogans : « Boma Muluba Tika nyoka » (Tuez le Muluba, laissez le serpent en vie !)
Sur l’épineuse question rwandaise et du M23 qui préoccupe tant les Congolais, les opposants ont montré leur couleur : le camp de Katumbi a du mal à condamner ouvertement Paul Kagame et l’agression rwandaise. Si bien que d’aucuns soupçonnent une certaine connivence. C’est aussi cela le bilan de l’opposition.
Quel projet de société de l’opposition ?
Aujourd’hui, à l’approche des élections prévues le 20 décembre, quel est le projet de société de l’opposition congolaise ? Nous savons tous que le pays va mal, mais quelle alternative propose l’opposition en termes de programme ? Jusqu’à présent, il semble que le seul projet soit de chasser Tshisekedi du pouvoir. Bon, peut-être que les opposants attendent de dévoiler leur projet de société en période de campagne électorale. En fait, je ne leur en tiens pas du tout rigueur. Je suis juste en train de comptabiliser ce qu’ils ont fait en cinq ans. De même qu’on le fait pour le régime en place.
D’autres opposants qu’on peut qualifier « de la dernière pluie » ont vu le jour chemin faisant. C’est le cas de Matata Ponyo, Jean Marc Kabund, Franck Djongo, etc. Mais, Kabund sait qu’il est l’un des grands artisans du régime de Félix Tshisekedi. Nous avons tous vu comment il se comportait en prince au dessus de la loi lorsqu’il était président ad intérim de l’UDPS et vice-président de l’Assemblée nationale. Et Matata ne nous a pas encore fait oublier le dossier Bukangalonzo… Curieusement, c’est ce genre d’opposition-là qui critique beaucoup les autres !
Des marches pacifiques en demi-teinte !
En cinq ans, reconnaissons-le, l’opposition n’a organisé que très peu de marches pacifiques. Pas de ville morte… Preuve peut-être qu’elle avait du mal à mobiliser la population. Certes, il y a eu des marches dispersées, (je condamne cela), mais d’autres ont eu lieu sans encombre. Sauf que le public drainé dans la rue n’était pas si spectaculaire que ça. On était loin, très loin des rues noirs de monde auxquelles on était habitué avant, lors des marches pacifiques. C’est aussi cela le bilan de l’opposition en cinq ans.
La dernière marche pacifique organisée par l’opposition le 20 mai semble remettre celle-ci sur la bonne voie et c’est une bonne chose. L’opposition doit se ressaisir et redorer son blason. Je constate qu’elle a attendu l’approche des élections pour réellement sortir la tête de l’eau. Comme si les élections constituaient sa seule motivation ! C’est aussi cela le bilan de l’opposition en cinq ans.