La 18e édition du concours international d’écriture, Chansons sans frontières, a proclamé deuxième le texte Je ne suis pas poète de l’artiste slameur congolais Chicco Mwenge Iceberg. À travers ses vers, il lance un appel à la révolution contre l’injustice.
Pour cette année, « Escalader le ciel » était le thème du concours qui a connu 1409 participants venus de 96 pays du monde parmi lesquels Haïti, Maroc, Belgique, Slovénie, Tunisie, Burundi et République démocratique du Congo. Dans le slam de Chicco Mwenge, on peut retenir ce passage : « Ne pas voir le mal et croiser les bras. Il faut lutter. Quand le mal brise ta porte, lutte, ne chahute pas, n’attends pas que ça t’emporte. »
Prix droits de l’homme en 2018
L’artiste a déjà gagné plusieurs prix dans sa carrière. C’est le cas par exemple du concours national des droits de l’homme en 2018. « Je suis toujours motivé par le perfectionnement de mon art et être un plus dans ce domaine est mon leitmotiv. Participer au concours m’aide à atteindre ce but », explique-t-il.
Chicco Mwenge Iceberg est un artiste engagé et animateur culturel évoluant à Goma au Nord-Kivu, dans l’est de la RDC, région où les conflits armés font de plus en plus de victimes parmi les populations civiles. « J’utilise la poésie pour tirer sur le mal et l’injustice. C’est mon chemin vers les cœurs des autres et ma façon à moi de contribuer au changement. Mon souhait est de voir les autres vivre en paix. L’injustice me rend fou, ainsi je le combats », martèle-t-il.
Découvrez ci-dessous le texte « Je ne suis pas poète » de Chicco Mwenge Iceberg
Je ne suis pas poète
Je ne suis pas poète, je lutte
Comme nous avons écrit des mémos
mais le changement est resté photo
Je passe à une autre étape
A la place des mots j’ai pris le marteau
Ainsi je frappe la tête
Pour toucher directement le cerveau
Comme ils ont remplacé leur conscience par le caniveau
J’ai troqué mon stylo par une pioche
pour le remplir et faire le niveau
Je ne suis pas poète, je fouette
Un poète réfléchit beaucoup
Alors que quand on a la corde au cou
Pour survivre on n’a pas de choix ; on donne des coups
Alors épargnez moi des métaphores
J’ai remplacé les virgules par un étau
Car ils ne bougent pas si on ne serre pas fort
Quand le mal brise ta porte
Comment tu te comportes
Tu luttes ou tu chahutes
Tu te révoltes ou tu attends que ça t’emporte
Je ne fais pas du slam, je blâme, j’enflamme
Le slameur ça attend que ça s’inspire
En attendant la mauvaise gouvernance bâtit son empire
Moi j’agis sans attendre le pire
Je me délie des tournures des strophes
J’enlève les apostrophes comme des gants
Pour donner à l’injustice des vraies baffes
Au mal je fais très mal
J’enfile les bottines de la révolution
Pour le bien-être du peuple je reste gardien de but
Les ennemis de la vérité m’appelleront fils de Belzebuth
Je ne suis pas poète, je résiste
Comme à la voix du stylo ils ferment les oreilles
Comment faire le kilo si on ne leur piétine pas les orteils
Alors j’ai changé le papier et la plume
Par l’enclume pour faire assez de bruits
Ils n’agissent pas si on ne les embrouille pas avec plus de volume
Quand tu pries ils bouclent les portes de leur ciel
Quand tu cries ils trouvent que c’est essentiel
Ils diront que suis impoli
Car sur le lit de la corruption
Je fais pipi
et sur la table d’or de leur richesse illicite
je fais popo
Quand le mal brise ta porte
Comment tu te comportes
Tu luttes ou tu chahutes
Tu te révoltes ou tu attends que ça t’emporte