Pourquoi ai-je l’impression que nous vivons du déjà vu depuis toutes ces décennies ? J’ai posé cette question à ma voisine dans l’avion, une jeune Sœur Catholique de teint noir. Très lentement, elle arrange ses lunettes avant de lâcher d’une voix calme : « Nous, Congolais, n’apprenons pas de l’histoire. Ni de la notre, ni de celle des autres ! »
Oh, mon Dieu ! Comme elle a raison ! D’ailleurs, nous sommes encore en train de revivre un autre déjà vu : une messe où des politicards se partagent le gâteau. Je parle du dialogue en cours à Kinshasa. Quant au peuple, « l’article 15 » de la dictature de Mobutu s’applique : « Citoyens, débrouillez-vous ! »
Ces 5 leçons pourraient nous aider à mieux nous « débrouiller ». Et probablement, ravir tout le gâteau pour un repartage équitable.
Leçon 1 : la communauté internationale n’est pas notre amie
Posez la question à Patrice Emery Lumumba, notre héros national qui, à un moment, a fait confiance à cette communauté internationale. Elle s’est tout simplement débarrassée de lui et a poursuivi le pillage de nos ressources naturelles, amenant des milices armées, semant la terreur depuis 20 ans.
S’abandonner totalement, dans les mains de la communauté internationale et espérer un changement : c’est comme remettre un os au chien. Et espérer le retrouver intact après. Comptons plutôt sur nos pairs au niveau régional et africain, qui partagent la même vision que nous. C’est ce qu’avait fait l’ANC de Nelson Mandela. On peut collaborer avec la communauté internationale, mais, compter sur elle à 100% serait une erreur monumentale.
Leçon 2 : ce que femme veut, Dieu le veut
Au Liberia, les femmes ont joué un très grand rôle dans la chute de l’ancien dictateur Charles Taylor. Elles n’ont pas attendu l’argent d’une quelconque organisation pour se mobiliser, organiser des sit-in et plaidoyer en faveur de la paix. Pourquoi pas chez nous ? Pourquoi courir derrière les per diem des discussions politiques et saboter le vrai pouvoir de nos femmes citoyennes ? Elles n’ont pas besoin de l’autorisation de personne. Alors pourquoi ne pas les encourager ?
Ça peut être par une grève de sexe ou tout autre moyen, peu importe. Il nous faut des solutions et elles en détiennent les clés.
Leçon 3 : les politiciens n’ont pas le dernier mot
En janvier 2015, le peuple a réussi à bloquer une loi qui risquait de faciliter un prolongement du mandat de l’actuel président, Joseph Kabila, après le 19 décembre 2016.
Le président du Sénat congolais, Léon Kengo Wa Dondo avait clairement dit « Nous avons été à l’écoute de la rue ! » Arrêtez donc de courir partout en criant : « Ils lui ont donné un troisième mandat. Ils ont signé ceci ou cela. » C’est le peuple qui a le dernier mot. Et il se fera entendre par tous les moyens nécessaires. Si vous faites partie de ce peuple, vous savez ce que vous avez à faire.
Leçon 4 : la rue oui, la diplomatie surtout !
Si nous pouvons apprendre quelques choses de nos amis du Maghreb, c’est qu’il y a eu beaucoup de discussions entre certains hauts gradés de l’armée et du gouvernement, qui étaient favorables à la mobilisation populaire. Que ce soit, des contacts directs ou par intermédiaires sûrs, il faut trouver un moyen de détecter et approcher les potentiels alliés présentement au pouvoir. C’est ainsi que s’obtiennent des défections en faveur de la masse. La rue, oui, mais la diplomatie est capitale.
Leçon 5 : une alternance se prépare
Changer un président de la République, c’est la moindre des choses à faire. Changer un système de fonctionnement, c’est tout le travail. Pourquoi beaucoup de victoires citoyennes finissent récupérées par des opportunistes au sein de l’armée et parfois même des proches du pouvoir tombé ?
Pourquoi dans certains pays qui ont connu des luttes citoyennes réussies, rien n’a vraiment changé du côté du citoyen ordinaire ? Commençons à nous préparer nous même à assumer des responsabilités pour ne pas remplacer un lion par un loup.
changement- rupture