article comment count is: 0

Cour constitutionnelle vs Conseil d’Etat : une guerre qui déshonore la justice

Le torchon brûle entre deux des trois hautes Cours du pays. A la base : le contentieux électoral sur l’élection des gouverneurs dans trois provinces. Alors que le Conseil d’Etat, dont la compétence dans cette matière est reconnue par la Constitution, a été le premier à être saisi et à se prononcer dans cette affaire, la Cour constitutionnelle s’y est immiscée, créant ainsi un antécédent sans précédent.

La nouvelle est tombée comme un couperet le 22 juillet 2022. Dans un tweet, l’Association congolaise pour l’accès à la justice (Acaj) annonçait que la Cour Constitutionnelle a « déclaré inconstitutionnels, donc anéanti, tous les arrêts rendus par le Conseil d’Etat dans le contentieux électoral ayant opposé Aimé Bokungu à César Limbaya » dans la province de la Mongala. 

En fait, saisi en instance d’appel pour les arrêts rendus par la Cour d’appel de Mbandaka siégeant comme Cour administrative d’appel, le Conseil d’Etat avait décidé de radier César Limbaya. C’était après avoir établi l’existence d’une fraude massive ainsi que l’utilisation des biens et services de l’Etat par un candidat. Ce qui ouvrait ainsi la voie à la victoire d’Aimé Bokungu. Cet arrêt a été confirmé à l’issue d’une deuxième requête cette fois-ci en révision d’erreur matérielle.

Une « honte judiciaire »

Avec cette décision de la Cour constitutionnelle, l’on se retrouve désormais en face de deux arrêts contradictoires émanant de deux juridictions siégeant en premier et dernier ressort et dont les décisions sont exécutoires et opposables à tous. Pour plusieurs juristes que j’ai approchés, la Cour constitutionnelle a clairement violé les plates-bandes du Conseil d’Etat. Pour appuyer leur thèse, ils évoquent deux jurisprudences : la rentrée judiciaire de 2021 et l’arrêt R.Const 1272. 

En effet, le 16 octobre 2021, le duo Kaluba et Mukolo, respectivement président et procureur général près la Cour constitutionnelle à cette date, complété par le bâtonnier national de l’époque, Matadi Wamba, avait clairement soutenu que « les décisions de justice échappe à la compétence de la Cour constitutionnelle ».

Déjà, l’arrêt R.Const 1267 consécutive à la requête en inconstitutionnalité de Wanyanga contre un arrêt de la haute Cour militaire posait une jurisprudence en ce que la Cour se déclarait « incompétente » sur la base des articles 149, 160, 162 et 168 de la Constitution. Qu’est-ce qui a changé aujourd’hui ?

Le président de la République en arbitre ?

A ce stade, tout semble coincé. Quel arrêt appliqué ? Celui de la Cour constitutionnelle ou du Conseil d’Etat ? Clairement, l’on se retrouve dans une situation qui n’honore pas la justice dans un pays qui prône l’Etat de droit.

Aux termes de l’alinéa 4 de l’article 149 de la Constitution, « les arrêts et les jugements ainsi que les ordonnances des cours et tribunaux sont exécutés au nom du président de la République ». Qui de plus indiqué que lui pour nous sortir de cet imbroglio, d’autant plus que la même Constitution lui confère les « prérogatives de régulateur et d’arbitre du fonctionnement normal des institutions de la République » ? 

 

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion