Crédit : photo tiers
article comment count is: 0

Enrôlement des électeurs à Butembo : les difficultés des déplacés de guerre venus de Beni

Les déplacés de guerre fuyant les atrocités des rebelles ADF en territoire de Beni se sont fait enrôler à Butembo à partir du 26 février 2023. Cependant, nombreux parmi eux dénoncent le monnayage de l’accès au bureau d’enrôlement et d’identification des électeurs.

Plusieurs déplacés de guerre établis à Butembo sont contents d’avoir obtenu la précieuse carte d’électeur (qui reste aussi la pièce d’identité en RDC). Mais en même temps, ils se battent pour leur survie, en termes de pain quotidien. C’est le cas de Bernadette, une veuve mère de cinq enfants qui a attendu trois jours pour obtenir sa carte d’électeur dans un centre d’enrôlement spécialement implanté pour les déplacés à Butembo. 

Bernadette se plaint : « Quand vous arrivez au centre d’enrôlement, on vous repousse. Mais on laisse entrer soit celui qui paie un peu d’argent aux agents de la Céni, soit celui qui a son smartphone et qui a enregistré ses informations sur l’application de la Céni. Je me demande si un déplacé n’a pas les mêmes droits que les autres. »

Et d’ajouter : « Je suis arrivée au centre le matin à 7h et j’ai quitté à 16h sans avoir ma carte. Le lendemain, je suis revenue, on m’a remis un jeton avec un numéro difficile à atteindre le même jour. Et je suis repartie désespérée pour finalement repasser le troisième jour. Imaginez, en restant tout ce temps au centre, qu’est-ce que vont manger mes enfants ? »

Le message des déplacés de guerre vivant à Butembo est sans équivoque : ils veulent la paix. Car celle-ci leur permettra de retourner dans leurs villages abandonnés à cause de la guerre. « Il faut que cette guerre cesse pour nous permettre de retrouver nos villages et de nous choisir nos dirigeants », souhaite Kamala, déplacé de guerre qui a fui son village dans la province de l’Ituri.

Une autre déplacée de guerre de Kamango en territoire de Beni, c’est Marie-Jeanne. Elle parle de son enrôlement : « Je me suis fait enrôler ici malgré moi. Aucun autre choix ne s’offre à nous. Nous n’avons plus rien chez nous. » 

Non à l’exploitation des déplacés de guerre à des fins électorales !

Suite à l’insécurité persistante à Béni, la déception est réelle chez les déplacés de guerre vivant à Butembo. Ils réclament une meilleure prise en charge. 

Cependant, ces déplacés refusent d’être un fonds de commerce des politiciens. La coordonnatrice de l’ASBL Intégration sociale pour la promotion des nécessiteux (Ispron), une structure qui encadre des déplacés, témoigne qu’au début des opérations d’enrôlement des électeurs, certains acteurs politiques ont proposé de les retourner dans leurs milieux d’origine pour s’y faire enrôler, mais ils ont refusé. 

« Les déplacés ont rejeté l’offre, puisque leurs milieux d’origine ne sont pas encore pacifiés. Quelqu’un avait proposé d’organiser leur transport en camion jusque dans leurs villages pour l’enrôlement et ensuite les retourner ici à Butembo. Ils ont refusé, car ils ont compris qu’on voulait simplement les exploiter pour des intérêts politiques de certaines personnes », nous a expliqué la coordonnatrice d’Ispron.

La centrale électorale espère un retour rapide de la paix dans les zones d’origines des déplacés où iront voter ceux qui se sont fait enrôler à Butembo.

 

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion