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L’ethnicisme : un frein à la cohabitation pacifique en RDC

En RDC, certaines ethnies ont leurs propres milices armées. Elles disent que c’est pour « se protéger des autres ethnies », mais aussi des « envahisseurs ». D’autres vont plus loin, jusqu’à confisquer un territoire entier, parce que les habitants majoritaires sont issus d’un certain groupe ethnique. L’ethnicisme est une véritable arme de division des communautés. Ses victimes se comptent par centaines, voire milliers, dans l’histoire du pays.

Quand vous pensez que votre groupe ethnique est plus important que le reste du pays, c’est là que les conflits commencent. Conséquences : les disputes, la méfiance, la haine, puis la guerre. Chacun veut que « son ethnie » ait plus de pouvoir, plus de terres, plus d’avantages et plus de droits. Dans un pays de plus de 450 ethnies, cette façon de penser devient une recette explosive contre l’unité nationale.

Revendication de droits basés sur l’ethnie

Dans certaines régions, des communautés disent : « Cette terre est à nous depuis nos ancêtres. Personne d’autre que nous ne peut y vivre, ni y travailler ! » Or, ces terres-là sont aussi habitées par d’autres Congolais qui y sont nés, y ont grandi, et n’ont connu aucun autre milieu de vie. Cela conduit à des conflits fonciers souvent sanglants.

Prenons l’exemple des tensions entre les Hema et les Lendu dans l’Ituri. Chaque groupe revendique le droit de propriété sur certaines terres. Ce conflit, au départ foncier, a dégénéré en violences interethniques graves, faisant des milliers de morts. Aujourd’hui, ce conflit continue de faire des victimes. C’est inacceptable !

Partis politiques ou groupes armés ethniques

Quand un parti politique est créé pour ne servir qu’une ethnie, on ne fait plus la politique nationale, mais la politique ethnique. Le citoyen devient militant, non parce qu’il croit à un projet de société, mais parce qu’il partage la même ethnie que le leader du parti. Ridicule, non ? Malheureusement c’est cela la réalité.

Dans l’est de la RDC, des milices comme les Maï-Maï, Codeco, NDC, Red Tabara, Bilozi Bishambuke, Kifuafua, Yakutumba… sont des groupes armés liés par exemple à la tribu Bembe, Hutu, Hunde, Tutsi ou Nande… Ils ont vu le jour dans un contexte général de « protection communautaire ». Mais cette protection se transforme rapidement en règne de la terreur. L’ancien chef de guerre Thomas Lubanga, par exemple, a été condamné par la CPI pour avoir enrôlé des enfants soldats, essentiellement issus de son ethnie, dans une guerre contre une autre communauté.

Violences et exclusions

En fait, l’ethnicisme est démoniaque. On empêche les gens d’aller à l’école, de travailler ou de voter, simplement parce qu’ils viennent du « mauvais » groupe ethnique. L’exemple tragique de Yumbi en 2018 en est un triste témoignage : plus de 500 personnes ont été massacrées en quelques jours dans un conflit entre les Banunu et les Batende. Simplement parce qu’un chef traditionnel devait être inhumé sur une terre contestée. Détail macabre : certains corps ont été jetés dans le fleuve Congo.

Un autre conflit concerne les Banyamulenge, souvent qualifiés « d’étrangers ». Vrai ou faux ? Je pense que sur ce débat, beaucoup ont tort. Certains de nos compatriotes Banyamulenge ont vu leurs droits remis en question. Pourtant, ils sont nés en RDC, parlent les langues locales, etc.  Mais certains les déclarent « non Congolais ». Ce rejet de toute une communauté a alimenté, comme pour d’autres groupes ethniques, la création de milices d’autodéfense qui ont aggravé la crise. C’est le serpent qui se mord la queue !

Construire la paix pour tous

Plus jamais d’ethnicisme ! Un ethnicisme nourri par l’ignorance, l’injustice, l’instrumentalisation politique et l’exclusion dans la répartition des ressources. Pour lutter contre ce maux qui plombe notre cohabitation pacifique, nous devons promouvoir une éducation inclusive qui enseigne le respect de toutes les cultures. Un cours sur la cohabitation pacifique devrait valoir autant que les mathématiques. Punir sévèrement les discours de haine et les actes de discrimination, même lorsqu’ils viennent de politiciens « respectés ». Encourager les projets communs entre communautés, pour montrer que la diversité peut être une force et non une menace.

Chacun a ce devoir de rappeler cette simple vérité à son voisin : « On peut être Tetela, Yaka, Nande ou Ne Kongo… mais avant tout, on est Congolais ! » Dépolitisons l’ethnie et recentrons le débat sur les compétences, la justice, l’unité et le développement. Le Congo ne devrait pas avancer avec une carte nationale divisée en 450 morceaux d’identités opposées !

 

 

*Ce contenu de sensibilisation est produit dans le cadre du « Peace Project’’, un projet de paix mené dans l’est de la RDC, notamment dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu, en partenariat avec l’ONG néerlandaise Mensen Met Een Missie (MMM). Ensemble, nous encourageons les communautés à adopter et à partager davantage de récits alternatifs et inclusifs, afin de promouvoir la paix sociale, le dialogue et le vivre-ensemble. Cette initiative s’oppose aux discours de haine, à la manipulation et à la violence, qui fragilisent le tissu social.

 

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