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La Lucha n’a pas besoin d’un mandat du peuple, elle fait partie du peuple

« La Lucha n’a pas le mandat du peuple, elle n’a pas le droit de parler en son nom ». Ces propos sont ceux du blogueur Rodriguez Katsuva dans son billet publié le 7 novembre 2017 sur Habari RDC. Pour moi, s’en prendre à la Lucha, en ignorant l’engagement citoyen jusqu’à présent modèle de ce mouvement, est une prise de position qui dérange. Voilà pourquoi je me dois de réagir.

La Lucha fait partie intégrante du peuple, elle n’a donc pas besoin d’un quelconque mandat. Qui demanderait un mandat à un  jeune qui réclame son droit d’étudier dans des bonnes conditions ou qui réclame un emploi ? Est-ce raisonnable d’exiger un mandat du peuple à une femme qui en a marre d’être victime de viol en raison des guerres à répétition au Congo ?

Après que certains de ces jeunes de la Lucha ont passé injustement 17 mois en prison, vous pensez qu’ils ont tort de réclamer leurs droits ? Déjà, ceux qui ont les mandats du peuple via les élections en ont abusé. Ce peuple devrait-il se taire ? Non ! La Lucha n’est pas censée parler au nom du peuple, mais la Lucha c’est le peuple qui parle. Car c’est un mouvement citoyen, et non une institution.  

Les victoires de la Lucha

Contrairement à certains mouvements citoyens debout, mais uniquement sur les réseaux sociaux, la Lucha mène des actions visibles sur le terrain. Depuis 2016, ces jeunes mettent leurs mains dans les immondices de Kinshasa, faisant le « salongo » volontairement, un héritage oublié de feu le dictateur Mobutu. Pour ça, ils se font arrêter, mais ils ne baissent pas les bras. Ces actions et celles d’autres citoyens ont poussé le gouvernorat de Kinshasa à revoir son programme d’assainissement de la ville.

Sans mandat du peuple, la Lucha a fait partie de ces rares mouvements de jeunes qui ont participé aux consultations pré-dialogue de la Cité de l’UA. Toujours sans mandat et se réclamant ouvertement contre le maintien au pouvoir du président Kabila, ce mouvement est l’unique que Kabila a rencontré personnellement. C’était le 18 août 2016 à Goma.

Pour son courage, Rebecca Kavugho, membre de la Lucha, a reçu le prix international « Femmes de courage » après avoir été arbitrairement emprisonnée avec ses compagnons. Ces mérites et d’autres actions encore, prouvent à suffisance que l’action de la Lucha n’est pas un coup d’épée dans l’eau. Elle est entendue, suivie et considérée par le peuple.

La Constitution donne mandat à la Lucha

Venons-en à la désobéissance civile que lance la Lucha. Il est vrai que je ne suis pas du tout d’accord avec cette initiative car je ne voudrais pas voir notre pays se transformer en « zombie land ». Mais qui suis-je pour m’opposer à ce qui leur est garanti par la Constitution ? « Tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution», stipule l’alinéa 1 de l’article  64 de la Constitution. Toutes les institutions actuelles étant constitutionnellement hors mandat, sur quoi se baserait-on pour juger illégitime cette initiative de la Lucha ?

En outre, la même Constitution garantit la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique à tous les Congolais. (Article 23 et 37). A mon avis, la Lucha ne fait que jouir et faire usage de ses droits constitutionnels. Elle n’a jamais fait usage des armes, à ma connaissance ! Si malgré tout, il vous faut toujours un mandat pour comprendre et justifier les actions de cette organisation, je vous dis que la Constitution est donc le mandat de la Lucha.

Ainsi, avant d’exiger un quelconque mandat du peuple aux mouvements qui font partie du peuple, rassurez-vous d’avoir eu gain de cause auprès de ceux qui ont abusé de leur mandat, les uns depuis 2006, les autres depuis 2011, sans rendre compte à ce même peuple !

De grâce, laissez la Lucha faire son travail.

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