Crédit : photo tiers
article comment count is: 2

Vous dites les pires élections que le Congo n’ait jamais connues ?

Faisons un peu la comparaison entre les élections du 20 décembre 2023 et celles du passé. Certains prétendent que les scrutins organisés par Denis Kadima seraient les pires que le Congo n’ait jamais connus. Pourtant, en faisant un bond dans l’histoire, on se rend compte que le processus électoral de 2023 n’a rien à envier à ceux par lesquels notre pays est passé. Décryptage.

Élections de 2006

Sous la houlette de feu abbé Apollinaire Malu Malu, la Commission électorale indépendante (CEI) de l’époque organisait un scrutin devant mettre fin à de longues années de transition entre des forces qui s’opposaient par les armes. Perçu dans l’Est occupé comme celui qui accepta de partager le pouvoir pour réunifier le Congo, Joseph Kabila était aux prises avec Jean Pierre Bemba, pour qui l’opinion était plus favorable dans l’Ouest.

À l’issue du premier tour, 8 candidats sur les 33 en lice ont dénoncé des fraudes massives (bourrage d’urnes, corruption de témoins et falsifications des PV). Dans l’entre deux tours, des éléments armés des deux candidats retenus au deuxième tour, s’affrontaient en pleine capitale Kinshasa les 20, 21 et 22 août 2006. Enfermé dans sa résidence attaquée, Jean Pierre Bemba voulait renoncer à se présenter au deuxième tour, estimant qu’on a essayé d’attenter à sa vie. De son côté, Etienne Tshisekedi a boycotté le processus et n’a aligné aucun candidat à tous les niveaux des élections. En plus, prévues pour se tenir après juin 2005, date officielle de la fin de la transition, les élections furent organisées avec une année de retard, soit en juillet 2006.

Élections de 2011

Avec le pasteur Ngoy Mulunda aux commandes de la Céni, les élections de 2011 n’ont pas non plus connu un sort élogieux. Cette fois-ci dans la course, Étienne Tshisekedi et un Vital Kamerhe défenestré de l’Alliance de la majorité présidentielle. Le scrutin qui a octroyé le second mandat à Joseph Kabila a donné lieu à des mêmes accusations de fraudes qu’en 2006. Bourrages d’urnes, cartes d’électeurs délivrées à des mineurs, omission des noms sur les listes électorales, localisation imprécise des bureaux…

À Kinshasa, la Céni avait même perdu 2 000 plis de résultats des bureaux de vote sur 3 000 dans l’ensemble du pays, soit l’équivalent de 350 000 voix qui n’ont jamais été comptabilisées. Un processus qualifié déjà de chaotique par le Centre Carter, principale mission d’observation à l’époque, qui en outre, avait documenté dans son rapport, de nombreuses autres irrégularités pour lesquelles des candidats ont exigé l’annulation du scrutin.

Élections de 2018

Dirigée par l’actuel rebelle Corneille Nangaa, la Céni de 2018 n’aura pas non plus tenu toutes ses promesses en matière de transparence. On peut noter par exemple qu’il a été dénoncé des électeurs sans empreintes digitales, ni photos ou encore n’ayant pas d’âge légal. Et la Céni se justifiait disant : « Les personnes enrôlées sans empreinte peuvent être celles qui n’ont pas de doigts ou de main (sic), ou alors celles qui se livrent aux activités agro-pastorales. » Le qualificatif d’« élections chaotiques » revenait encore sur les lèvres des observateurs.

Élections de 2023 

Ici, la différence avec le passé est que des problèmes logistiques qui ont retardé le début d’ouverture des bureaux de vote, ainsi que les irrégularités constatées par les observateurs et les témoins, ont poussé la Céni à sanctionner les auteurs. 82 candidats ont été invalidés et des résultats annulés dans les circonscriptions concernées par les fraudes massives. Une décision courageuse. C’est la première fois, à ce stade du processus, que la Céni faisait le ménage avant même de transmettre tous les PV aux instances judiciaires. Les résultats ont été publiés circonscription par circonscription et bureau de vote par bureau de vote. Ce qui a permis de désamorcer d’éventuelles tensions et manipulations post-électorales.

Pour moi, c’est un bon début qui marque une rupture nette avec les précédentes administrations. Loin d’être parfaites, ces élections de 2023 ne sont pas « les plus chaotiques » de notre histoire. Il n’y a pas eu d’affrontements à l’arme lourde en pleine ville de Kinshasa pour imposer les résultats… bref, à mon avis, de tous les quatre cycles électoraux, celui de 2023 est le moins mauvais.

                                                                            

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion

Les commentaires récents (2)

  1. Analyse limitée, probablement subjective ou commandée. Une bonne comparaison doit définir les indicateurs clés d’une élection crédible et comparer les mêmes. Aussi utiliser deq données probantes. Sauter d’un facteur à l’autre, en relevant des faits vaguement documentés n’est pas une comparaison.