Comme en 2016, c’est déjà une évidence qu’il n’y aura pas d’élections en RDC cette année. Il est facile d’accuser Kabila de vouloir se maintenir au pouvoir au-delà de son dernier mandat constitutionnel. Mais penser qu’il est le seul responsable de ce glissement serait une injustice.
L’opposition réunie au sein du Rassemblement, qui avait signé avec la majorité un accord pour organiser des élections fin 2017, porte aussi une responsabilité en raison de ses multiples tergiversations et de sa soif du pouvoir.
Le peuple déçu par le Rassemblement
À la naissance du Rassemblement à Genval en Belgique l’année passée, une vraie force s’était créée pour pousser Kabila à organiser les élections dans les délais constitutionnels. Les Congolais retrouvaient en cette plateforme un porte-étendard de leurs aspirations. C’est cette force du Rassemblement qui a poussé Kabila à accepter un deuxième dialogue parrainé par la Cenco. Malheureusement, comme une bougie allumée aux deux bouts, le Rassemblement n’a pas brillé longtemps. Il y a eu d’abord une sorte de folie des grandeurs, puis des querelles internes après la mort d’Etienne Tshisekedi, fragilisant ainsi cette plateforme et offrant une large marge de manœuvre aux Kabilistes qui ont tout fait pour retarder la mise en œuvre de l’accord de la Saint-Sylvestre.
« Tshisekedi ou rien », la méthode qui ne paie pas
La cohésion au sein du Rassemblement n’a existé qu’autour d’Etienne Tshisekedi. Le G7 et le reste des partis de l’opposition parlaient d’une seule voix. Après la mort de Tshisekedi, tout est parti en vrille, comme si sans Etienne Tshisekedi, le Rassemblement ne pouvait plus exister. Aujourd’hui quatre mois après sa mort, le Rassemblement n’est plus ce qu’il était à Genval. On compte plusieurs courants en son sein et tous se disent légitimes.
Le poste de Premier ministre, selon l’esprit de l’accord de la Saint-Sylvestre, devait revenir au Rassemblement. Or, quand Bruno Tshibala a été nommé Premier ministre issu d’une aile du Rassemblement, l’aile qui soutient Felix Tshilombo -fils de Tshisekedi- l’a désavoué. Pour ce Rassemblement, le Premier ministre ne devait être personne d’autre que Felix Tshisekedi. Pourtant, Bruno Tshibala a été collaborateur d’Étienne Tshisekedi pendant près de 36 ans. Cette façon de penser que seuls les Tshisekedi méritent tout ce qui pourrait être offert à l’opposition s’est montrée contreproductive, et la Kabilie en profite !
Rassemblement, revoyez à la baisse vos exigences
Il y a deux semaines, le G7 (plateforme membres du Rassemblement) déclarait ne pas vouloir participer au Conseil national de suivi de l’accord (CNSA). Et c’est bien dommage, car le CNSA est l’organe qui aura le contrôle sur le gouvernement, pour s’assurer que tout est mis en œuvre dans la préparation des élections ! Voilà qu’a six mois de ces élections, le G7 dit ne pas vouloir participer au CNSA. C’est une autre méthode contreproductive, car dans ce cas les « glisseurs » auront encore les mains libres pour « glisser ».
En réalité, le CNSA est la seule carte qui reste au Rassemblement aile Félix Tshisekedi. Au lieu de continuer à appeler le peuple dans la rue pour l’exposer inutilement au danger à des fins égoïstes, il serait préférable de faire des concessions pour prendre la tête du CNSA. Cela permettrait au Rassemblement de faire pression sur le gouvernement en vue d’obtenir les élections au plus tôt.
Le peuple est fatigué
Les Congolais n’ont pas oublié qu’il y a à peine deux mois, Felix Tshisekedi appelait les gens à manifester dans la rue, et que la veille du jour-j, il s’est envolé pour le Maroc où il était en sécurité auprès de Moïse Katumbi. Le Rassemblement ferait mieux de ne plus compter sur un peuple qui n’a que trop enterré ses morts à force de soutenir des individus.