Le transport en commun reste un des grands défis à relever au quotidien dans la ville de Kinshasa. Serait-ce à cause de la surpopulation dans cette mégapole de plus de 10 millions d’habitants ? Ou alors ce serait dû au mauvais état des routes, aux tracasseries policières et peut-être à la mauvaise foi des chauffeurs ?
Un jour, je suis au rond-point Victoire, un des grands carrefours de Kinshasa. Tout autour, une foule de gens en attente de transport, mais pas de bus pour les transporter. On peut entendre l’expression des mécontentements, murmures, colère, fatigue… Surtout lorsque le temps passe. La plupart des gens reviennent du boulot, moi aussi.
Prendre « la ligne onze »
À ma montre, il est déjà 20 heures. En plus, il a plu fortement sur Kinshasa, mais aucun taxi n’est là. Je me demande : « Que faire ? Vais-je passer la nuit ici ? Nalembi (Je suis fatiguée) ! »
Une femme robuste et noire, sandales à la main et pieds nus, me regarde et me dit en lingala : « Tokende kaka makolo. » [Allons carrément à pieds]. « D’accord ! », dis-je. On fait route ensemble. Ce devrait être une longue marche à pieds. Ici, ça s’appelle « tracer la ligne onze ».
Faire de l’athlétisme pour atteindre le bus
Soudain, j’entends derrière moi des pas claquer sur le sol, un sol glissant alors qu’il pleuvine. Je me retourne, c’est un bus inattendu qui vient d’arriver à l’arrêt. Le receveur crie : « Zando, zando, zando ! » [Marché central ! Marché central !]. Les gens accourent dans la précipitation. Mais quelle course ! Un véritable marathon ! On dirait le 400 mètres plat. Quelques minutes après, un autre bus crie : « Lemba, Lemba ! » pour dire qu’il va dans la commune de Lemba.
Des bus arrivent quand-même, mais en nombre insuffisant, au vu de la foule qui est là. La dame qui est avec moi se met à courir de toutes ses forces en direction du bus. Au même moment, un monsieur surgit et court à grandes enjambées. Il heurte mon épaule, cela m’énerve, je l’engueule. « C’est vraiment absurde. Pourquoi courir après le bus au lieu de se mettre pour entrer l’un après l’autre ? », dit un vieux monsieur fatigué et qui marche lentement. Tels des coureurs sur une piste d’athlétisme, les gens détalent littéralement en se frottant au vieil homme sans s’excuser. Les chauffeurs s’en foutent, l’important pour eux est de remplir le bus et partir. Leurs patrons attendent les « versements » !
Arrivés près de ce bus après notre grand marathon, on apprend que le prix de la course est doublé à « cause de la pluie ». Essoufflés, découragés et sans moyens, certains n’ont plus d’autre choix que de reprendre la « ligne onze ».
De loin, un autre receveur crie : « Yolo Kapela ! » Ouf ! C’est le quartier où je me dirige. Sans le vouloir, je me mets moi aussi à courir. C’est l’unique occasion pour moi, car il est déjà 21 heures passées… Je ne peux vous expliquer comment je me suis jetée à l’intérieur du bus, comme un fagot !
Désormais bien assise à bord, j’observe une scène d’un monsieur qui se précipite vers le bus. Il est sur le point de faire entrer sa jambe, lorsqu’une femme très ronde le bouscule et prend sa place. Le bus démarre. Le pauvre homme reste sans mot dire. D’un air fier, la femme ronde s’exclame : « Eh hé Kin oyo eza rando na rando, il faut kozala misu ga. » (À Kinshasa il faut être vigilant et fort car c’est un combat).
Tous ces scenarios font partie du quotidien des Kinois qui, comme moi, prennent les bus de transport en commun. Souvent, lorsqu’il pleut, la foule est tellement nombreuse que les bus ne peuvent contenir tout le monde. Prendre un bus de transport en commun, c’est aussi supporter les chocs de multiples nids de poules sur la route, des discussions inutiles des passagers, l’impolitesse des receveurs, les tracasseries policières, les vols à l’esbroufe… Bref, tout est mis en place pour être stressé.
Je suis tout à fait d’accord avec vos propos.Votre article décrit de manière précise et ciblée,la situation du transport dans la ville de Kinshasa.
Il y a un sérieux problème dementali
Transport, un des secteurs porteurs dans ce vaste chantier qu’est la RDC…