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Borner son champ pour éviter des conflits de limites entre agriculteurs voisins

En RDC, le Nord-Kivu enregistre beaucoup de tueries. Certains conflits de terres seraient à la base des assassinats ciblés dans la province. Ils sont causés par l’absence ou le déplacement des bornes entre les champs des agriculteurs travaillant côte-à-côte, mais aussi par des querelles entre héritiers des terres.

Les conflits fonciers sont devenus de plus en plus meurtriers au Nord-Kivu, notamment en territoire de Masisi. Ces différends tournent autour des terres, jusque-là non bornées.

A Sake par exemple, entité située à environ 20 km à l’ouest de  Goma, il ne se passe pas six mois sans qu’on n’en enregistre un cas de meurtre autour des conflits fonciers. C’est ce qu’affirme Omari Bwanamali, chef de bureau à la division provinciale des affaires foncières. « Mon père a été retrouvé mort en décembre 2019 dans son champ. Avant d’être tué, il recevait des menaces de mort de la part de l’un de ses frères biologiques. Ce dernier était mécontent du fait que notre grand-père a légué une très grande étendue de terres à papa », témoigne l’un des fils du défunt qui préfère garder l’anonymat. Le présumé « meurtrier a fortement violé les limites des terres de mon père. Sur une superficie d’un hectare, il ne nous reste que la moitié aujourd’hui », déclare le fils du défunt.

Comment éviter le cycle de violence ?

Après avoir écouté les victimes dont les terres ont été confisquées, je suis tenté de croire que ces conflits de limites de terres alimentent le cycle de violences au Nord-Kivu. Alors, est-il possible de stopper ces conflits de limites ? Maître Patient Kambere, avocat au barreau de Goma répond : « L’article 646 du code civil stipule que  c’est le bornage qui a pour effet de définir juridiquement les limites des propriétés privées appartenant à des propriétaires différents. Ainsi, pour éviter les conflits, tout propriétaire est obligé de borner sa propriété devant tout le monde, ses voisins surtout. »

Dans le village de Shonga à une vingtaine de kilomètres de la cité de Sake, pour avoir ignoré l’importance de borner leurs parcelles et champs, plus de 500 familles ont été brutalement expulsées de leurs terres par la police au profit d’un individu qui estime être le propriétaire légal de ce milieu.

Borner son champ, c’est le sécuriser

Pour l’une des victimes, Lukogho Amani, la soixantaine révolue, c’est une grande surprise de se retrouver dans la rue : « J’ai plus de 60 ans. Je suis né ici.  Ce monsieur se pointe avec des policiers et nous fait partir de chez nous ! Il a ruiné nos vies. Et surtout, je suis triste du fait que les témoignages et autres symboles coutumiers attestant que cette terre appartient à nos aïeux, ont été rejetés par le tribunal de grande instance de Goma. »

Les juges ont exigé des preuves que les victimes n’ont pas, à savoir : les bornes et autres actes fonciers qui attestent légalement le droit de propriété.

Sur place, je me suis rendu compte que de nombreuses personnes qui vivent dans la région ignorent l’importance du bornage. Pour cela, j’exhorte le gouvernement et ses partenaires, ONG et médias, à sensibiliser les populations pour éviter les conflits souvent sanglants de limite des terres des communautés locales.

 

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