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Quatre mentalités de sous-développement qui nous piègent

Pour nous enfoncer davantage dans nos conditions de vie peu éloignées de la précarité, nous dénigrons les autres. Nous voyons partout la méchanceté, alors que tout n’est pas parfait. Dans ces conditions, on accorde plus d’importance à son apparence plutôt qu’à vivre sa vie. Pour couronner ce cocktail du pourrissement de sa vie, on aime à détester ceux qui osent ou ceux à qui quelque chose réussit.

J’appelle tout cela : la mentalité de sous-développement. Car, ces attitudes nous poussent rarement en avant. Excusez-moi si mon propos vous choque ou si vous pensez que j’exagère. D’ailleurs, je souhaite que nous en discutions. Êtes-vous prêt ?

     1. Les jeunes et les vieux : qui écrit bien ?

Ce 18 août 2023, Lubumbashi à vibré, en fin de journée. Les résultats des épreuves nationales de fin d’études secondaires ont commencé à circuler. C’est officiel. Je m’arrête quelque part pour payer du crédit téléphonique. Trois personnes discutent. Deux considèrent que l’école est morte. Elles estiment qu’il n’est pas concevable qu’un élève obtienne une note de 80% à l’examen d’État. La preuve ? « Ils ne savent pas écrire. Ils parlent mal français », et on se demande comment dans ces conditions on se tape une telle note.

Si, sur le fond, ce questionnement me paraît légitime quand on sait les difficultés à bien écrire et à bien parler français pour les finalistes du secondaire, la logique est faussée et quelque chose gêne gravement ce raisonnement.

Mais je remarque qu’il n’a jamais existé une période où tout le monde a bien écrit et bien parlé. Tout le monde n’a jamais été brillant. Le contraire n’est pas non plus possible : tout le monde n’est pas bête parmi nos jeunes diplômés. D’ailleurs, les deux dernières années, j’ai reçu pour leurs travaux de fin de cycle de graduat, au moins cinq étudiants dont deux étaient vraiment brillants, y compris dans la recherche académique.

Je connais des aînés qui ont l’âge de mon père, mais qui s’expriment très mal. Ce n’est pas l’âge ni l’époque qui confèrent la compétence. La mentalité à dénigrer ou à tout ramener autour de soi est simplement un frein à sa vie. On se prive de voir la vie dans d’autres possibilités que celles qu’on a connues soi-même. On se fait justement l’unité de mesure de tout bien. Et ça, c’est source de nombreux problèmes.

     2. On déteste même des gens qu’on connaît à peine

La suite de cette mentalité, c’est détester ceux qu’on sent mieux outillés que soi dans un domaine précis. On aime à détester ceux qui réussissent quelque chose. On leur trouve un défaut qui atténue leurs qualités particulières. « Oui, il est un bon guitariste. Mais il danse comme un cabri ! », s’empresse-t-on de se hasarder même dans domaines dont on ne sait pas grand-chose.

Ce qui me fait pleurer, au Congo et dans l’évangélisation africaine, c’est de voir les gens continuellement dans un combat contre l’invisible. On voit le diable partout, même dans ceux qui donnent le travail. « Oh non, cette société-là exige d’être dans une loge mystique ! ». « Oh, pour être pasteur, il faut un sacrifice de sang ! ». Il n’est pas supportable de vivre dans un tel environnement. Dieu lui-même n’a-t-il pas créé cette belle terre pour être habitée par les humains ? Profitons un peu de cette vie qui est belle, et Dieu en sera ravi.

Le plus surprenant dans cette façon de voir le monde, tout succès s’explique soit par la sorcellerie ou le mysticisme, et tout échec par l’incompétence. On ne voit jamais d’autres possibilités.

     3. Pardon, la vie n’est pas si mal que ça : il faut l’apprécier !

A présent, pensons à ce gars terrible de votre quartier pour qui le monde est foncièrement méchant et les gens, des mauvais. « Bantu ni babaya », répète-t-on à Lubumbashi. Traduit en français, cela veut dire : « Les gens sont mauvais. » Que dire d’autre face à ce type de personnes ? C’est la fin du monde…

On ne prend pas d’initiative, on se méfie de tout le monde : surtout quand on se fait du blé. Ce que j’ai, c’est pour moi et moi seul. Que les autres se battent pour l’avoir aussi. Avec des gens pareils, on ne prend pas d’initiative, on ne fait pas de nouvelles rencontres. En réalité, on limite son univers à sa petite personne ou à son petit confort.

On ferme les portes même à ceux qui sont censés nous sortir des situations embarrassantes, comme le chômage. Vous le savez : dans pareil cas, on apprend le dernier que le voisin recrute un chauffeur. On est surpris que ceux qui viennent de l’autre bout de la ville ou du pays décrochent un emploi sous sa barbe. Bien entendu, il faut savoir bien se raser, n’est-ce pas ? Sinon, sa longue barbe devient l’arbre qui montre sa misère 🤣!

     4. Le mensonge devient une religion populaire

Voyons, enfin, cet autre cas qui me tient à cœur. Quand certains voient tout en mal, il y en a qui font le mauvais choix de ne jamais dénoncer le mal ou relever en toute objectivité ce qui ne va pas. Au Congo, je suis de plus en plus déçu de voir certains mentir, en majorité ce sont des hommes politiques.

Le mensonge est devenu comme une religion populaire. On croit qu’il faut mentir pour attirer la gentillesse des chefs, flatter pour obtenir des postes. Les chefs, malheureusement, écoutent plus les menteurs et les flatteurs et s’éloignent de ceux qui osent leur dire la vérité. On s’étonne souvent que de grandes gueules et d’excellents analystes d’hier, à l’opposition, deviennent de piètres dirigeants une fois devenus ministres ou mandataires publics.

Bref, ne dire que le mal des autres n’aide pas. Soyons justes et équilibrés en toute chose.

 

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