Descente aux enfers des jeunes mariés congolais

Voulez-vous vivre quotidiennement les fêtes de mariage aux allures de luxe princier ? En RDC, elles sont les plus prisées. Pour se marier dans ce pays, beaucoup de jeunes mettent tous leurs moyens, d’autres vont jusqu’à s’endetter pour offrir des cérémonies nuptiales les plus folles. « Ça va déchirer », c’est le slogan à chaque cérémonie de rêve ! 

Il n’est pas rare de voir des jeunes à peine élevés au « rang de princes et de princesses » par la cérémonie de mariage, redevenir sans domicile fixe, SDF. D’ailleurs, je me demande si la société n’y est pas pour quelque chose. Car, aujourd’hui se marier au pays de Lumumba, c’est accepter de gré ou de force de rivaliser de capacité à offrir les fêtes les plus spectaculaires. Je parle de ce qui se fait dans nos villes.

Crise économique, oui, mais conformité à la société oblige ! Chaque couple essaie de rendre ce moment « historique » indélébile et extraordinaire. Salle de fête ayant un décor à couper le souffle où vous devez nourrir vos 300 à 400 invités tout en veillant sur la qualité de vos mets, le choix d’un bon service traiteur, la location des voitures… Luxe jusqu’à la lune de miel ! Avec ça, le couple marié prouve qu’il a des poches pleines.

Pourtant, c’est un véritable casse-tête et un chemin du calvaire, quand on sait que les jeunes n’ont pas d’emploi ou d’emploi stable. Mais curieusement, tout le monde veut passer par là.

Même les cérémonies de pré-dot sont coûteuses !

Aujourd’hui encore pour plus d’éclat, beaucoup de couples recourent à la formule « demoiselles et garçons d’honneur ». Mais ce qui m’étonne le plus, c’est quand je vois cette pratique d’origine occidentale s’étendre même à la cérémonie de dot ! Mes yeux ! Et c’est le couple qui a la charge de les habiller. C’est une dépense de trop qui doit être supprimée.

En plus, dans mon pays, on célèbre trois fois le mariage : coutumier, civil et religieux. Vous comprenez là que le couple marié doit changer trois décors. On pourrait même dire que le mariage en RDC est devenu un feuilleton.

Ce qui me ronge l’âme c’est quand dans un contexte de pauvreté, les couples et les familles se donnent autant de peine pour rendre la cérémonie de mariage exceptionnelle, sans tenir compte du lendemain. D’ailleurs, le choix de la salle de fête, les champagnes, le goût du luxe sont des éléments de la tactique sociale d’expression d’un semblant de mobilité sociale, oubliant qu’on finit par être rattrapé par la pauvreté.

John n’a même pas un bon logis pour sa vie de couple

Dans mon quartier, à Lubumbashi, John s’est récemment marié à Julie. En tout cas, John m’étonne encore. Déjà avant son mariage, tout le monde savait qu’il se débrouillait et n’avait pas assez de sous pour se nourrir. D’ailleurs, à l’annonce de son mariage, beaucoup n’en revenaient pas. Et ce qui est surprenant, le jour-j, la fête était tellement chaude et VIP que je manque de mots pour la décrire.

Je vous le dis, comme c’est en Afrique, beaucoup d’invités ont à leur tour invité, mais tous ont mangé et bu jusqu’à ramener le reste de la nourriture et de boissons chez eux. Écoutez maintenant : dans la semaine qui a suivi, on a appris que John était expulsé de la maison qu’il avait prise en location. Alors que tout le monde cherchait à savoir ce qu’il était devenu après cet incident, c’est finalement dans un appartement d’environ deux mètres carrés à peine couvert qu’il trône.

Je ne trouve pas raisonnable d’organiser une manifestation grandiose de mariage lorsqu’on n’en a pas les moyens. Les personnes qui veulent se marier doivent savoir que leur union n’est que le début d’une vie. Organiser un mariage coûteux c’est compromettre leur avenir, car ils se retrouvent souvent plongés dans de lourdes dettes inutiles.

Je pense donc qu’avant de se lancer dans l’organisation des fêtes, les futurs mariés doivent évaluer sans pression leurs besoins, en les différenciant de simples envies budgétivores. Que les futurs mariés ne fassent pas les choses dans un contexte dualiste juste pour concurrencer d’autres personnes. Je leur conseille d’être objectifs et réalistes dans leurs prévisions.