J’ai pris part, en septembre dernier, à la troisième conférence minière à Kolwezi, région riche en cuivre et cobalt au sud de la RDC. Ce qui m’a intrigué, c’est le lieu choisi pour cette conférence de trois jours : le complexe scolaire Hewa Bora, à quelques encablures du centre-ville.
N’est-ce pas sacrifier l’éducation que de renvoyer les écoliers à la maison, parce qu’une conférence sur les mines doit se tenir dans leur école ? Devait-on en arriver là quand on sait qu’avec une tonne de cobalt, on peut avoir près de 100 000 $ et bâtir une ou plusieurs écoles, ou carrément une salle de conférence ?
La RDC, selon les statistiques du ministère des Mines, a produit cette année plus de 52 000 tonnes de cobalt. Ce qui rapporte au minimum 5,2 milliards de dollars. Certes, tout le montant n’appartient pas au pays, puisque les producteurs sont des sociétés privées. Mais elles paient des taxes, jusqu’à 10% de la valeur sur le cobalt (en tout cas théoriquement d’après le code minier).
Il est curieux qu’on continue pareil agissement en plein 21e siècle, tout en pensant au développement, et même au développement durable. J’ai eu l’occasion de parler à monsieur Vubu (nom changé), un des enseignants de l’école Hewa Bora, fermée durant les jours de la conférence sur les mines. « Nous avons été notifiés, il y a de cela une ou deux semaines, que les cours tarderaient à commencer suite à l’organisation des journées minières. Les parents ont été appelés à garder leurs élèves à domicile jusqu’à ce qu’un communiqué d’ouverture des classes soit annoncé », m’a expliqué l’enseignant.
Retarder les cours, et garder inchangées les conditions d’apprentissage
L’enseignant explique que l’école a connu un mois de septembre « incertain sur le début des classes », parce que les journées minières devaient avoir lieu au début du mois. Puis, la date a été repoussée au 14. Au total, en termes de respect du programme scolaire, l’école a désormais deux semaines de retard à rattraper.
Juste avant mon départ de Kolwezi, j’ai appris dans les médias locaux que quelques élèves du complexe Hewa Bora avaient protesté, réclamant la reprise des cours.
J’ai déjà entendu parler de la malédiction des minerais en RDC. Ce que j’en ai retenu, c’est qu’en rêvant d’argent facile provenant des ressources naturelles, on oublie de voir loin. Sacrifier ne serait-ce qu’une heure de classe, pour quelque motif que ce soit est déjà un acte irresponsable et regrettable. Mais là, à Kolwezi, on en est arrivé à deux semaines. Et pour quel résultat ? Des promesses de changement, et aucune amélioration quant aux conditions d’étude pour les écoliers, et de travail pour les enseignants. C’est simplement une honte, et un manque de considération pour l’éducation des jeunes.
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