Le 6 novembre, à Kinshasa, se sont ouverts les états généraux de la justice autour d’une question qui me semble essentielle : pourquoi la justice congolaise est-elle si malade ? Et que peut-on faire pour la sauver ? Face à cette initiative, je ne peux m’empêcher d’être sceptique. L’espoir d’une réforme profonde est-il sincère, ou s’agit-il d’un énième mirage ?
Pour moi, l’un des problèmes majeurs dont souffre la justice congolaise est une justice gangrenée par les ingérences de l’exécutif. Ce dernier est-il prêt à se remettre en question et à laisser la justice faire son travail, même lorsque des politiques sont impliqués ? Récemment, le président de la République a publiquement disculpé Nicolas Kazadi, l’ancien ministre des Finances, malgré son implication supposée dans plusieurs scandales financiers. Cet acte symbolise bien l’influence politique sur la justice, réduite à un instrument docile entre les mains du pouvoir, puisque quelques jours plus tard, le procureur, par une correspondance, a formellement mis Kazadi hors de cause. On s’attendait à un procès, on espérait que l’ex-ministre pourrait se justifier et prouver son innocence.
Une justice au service du pouvoir
Je suis consterné par cette justice à deux vitesses. Lorsqu’il s’agit de traquer les opposants, elle est rapide, inflexible, implacable. Mais face aux proches du régime, elle devient soudainement indolente, patiente, comme anesthésiée. Ce n’est pas la justice dont je rêve pour mon pays. J’aspire à un Congo où chaque citoyen est jugé à égalité, sans égard pour ses opinions ou son apparence politiques. Une justice qui ne serait pas un outil de domination.
Ce triste constat, le président lui-même l’a dressé dès son premier mandat. Mais quelles mesures concrètes a-t-il prises pour rétablir une justice crédible ? Quels juges inefficaces a-t-il sanctionnés ? Je doute sérieusement de la sincérité de cette démarche. Je me souviens des états généraux de la justice de 2015, qui s’étaient soldés par plus de 350 recommandations. Seule une vingtaine ont été appliquées. La réalité est que ces réformes finissent trop souvent aux oubliettes par manque de volonté politique.
Une fausse thérapie pour une vraie guérison ?
Je reste donc prudent face à ce nouvel appel à la réforme judiciaire. Une guérison véritable nécessiterait un courage politique qui, jusqu’à présent, manque cruellement. Si la justice congolaise veut véritablement se relever, elle doit devenir indépendante, affranchie de toute influence. Je crains que, sans cette volonté réelle, ces états généraux ne soient qu’une tentative d’apaiser temporairement les critiques, avant de fondre dans l’oubli.
Au Congo, la justice mérite d’être guérie.