En 2021, l’affaire du prélèvement de fonds par d’anciens dignitaires du régime via des cartes bancaires connectées au Trésor public avait fait grand bruit. Dans une vague d’indignation collective, les Congolais étaient offusqués que de tels privilèges puissent exister pour une poignée de personnes privilégiées, alors que le pays lutte pour se redresser. En faisant ma petite enquête, je me suis rendu compte que cette affaire, qui a eu un écho médiatique important sur les réseaux sociaux, n’en est pas à son premier épisode.
Il était une fois un Allemand au Congo : Erwin Blumenthal. Il fut conseiller de Moïse Tshombe qui à la faveur des circonstances politiques était devenu Premier ministre.
Erwin Blumenthal est choisi en 1978 par le Fonds monétaire international pour intégrer la Banque nationale du Zaïre en qualité de directeur intérimaire. L’objectif était de moraliser son administration et remettre de l’ordre dans les finances publiques.
Un rapport révèle des malversations financières scandaleuses
Après deux ans en poste, Blumenthal démissionne et retourne en Allemagne. Il rédigera un rapport en 1982 que ses supérieurs garderont longtemps secret pour ne pas vexer Mobutu, l’allié contre le communisme.
En parcourant ce rapport, on y découvre des frais de prélèvements en devises auxquels seul un cercle très restreint avait droit. Soins de santé, voyages personnels, négociations privées… l’argent de la Banque du Zaïre est ponctionné au gré des plaisirs des barons du régime.
Rien qu’en 1977, lui et ses proches ont retiré sans justifications sérieuses, 71 millions de dollars de la Banque nationale, asséchant régulièrement les réserves en devises. En 1978, il fait transférer les recettes de la Gécamines de l’exercice 1978, soit 1,2 milliard de dollars, sur un compte privé. La culture de l’impunité était telle que le Guide, comme il aimait se faire appeler, déclara lors d’un discours prononcé en 1977 : « Yiba muke, tika ndambu. » Traduction : ne volez pas tout, laissez aussi quelque chose.
Dans un pays où tout le monde passe son temps sur des futilités, on ne se rend pas compte que presque tout ce que nous vivons a déjà été vécu, à une période où une autre de notre histoire. Comme quoi, les mêmes causes (de gouvernance) produiront encore et toujours les mêmes effets.