Kinshasa, 19 décembre 2016. Il est 23 h 25. La ville s’électrise au rythme des sifflets, tintamarres et cris lancés par une frange de la population pour signifier au président Joseph Kabila que son second et dernier mandat prend fin à minuit. Malheureusement, c’est aussi à cette heure que le jeune Jacob Meskia trouve la mort, tué par balle.
Comment cela est-il arrivé ?
Tout a commencé par un appel mystérieux que Jacob a reçu. D’abord cette nuit-là, les habitants du quartier Petro-Congo s’étaient calfeutrés dans leurs maisons, portes et fenêtres verrouillées par peur d’émeutes et de représailles. Dans sa chambre, le jeune Jacob Meskia transpire de chaleur et a envie de se laver. Il sort à l’insu de tout le monde pour prendre une douche. De retour dans sa chambre, Jaco, comme l’appellent ses proches, décide de sortir une seconde fois. Curieusement, cette fois-ci, il sort même de la parcelle.
Ces va-et-vient répétés de Jaco réveillent du sommeil les membres de sa famille surpris de le voir longer tranquillement l’avenue, téléphone à l’oreille, jusqu’à disparaitre dans le noir épais qui envahit le reste de la rue. Jaco s’isole ainsi dans les ténèbres, toujours en pleine communication téléphonique.
Là, dans cette obscurité profonde causée par l’absence du courant électrique, Jaco se fait repérer puis interpeller par deux hommes en uniformes. Ces derniers le confondent à un manifestant et se mettent à le tabasser. A en croire les témoignages, Jaco a réussi dans un premier temps à s’échapper de mains de ses bourreaux. Hélas, dans sa fuite en pleine obscurité, il trébuche et tombe dans un trou.
Jaco n’est plus
Ses appels au secours alertent les gens du quartier présents à une veillée mortuaire. Ceux-ci tentent de lui venir au secours, mais en vain. Ils ont peur des crépitements de balles dans le quartier. La confusion et les détonations étaient telles que tout le monde prenait vite la tangente pour se sauver. Puis on entendit à nouveau un, deux, trois autres coups de balle ! Ensuite, quelques cris désespérés d’un homme qui implore miséricorde. Finalement, un silence de cimetière. Nul ne pouvait s’imaginer le pire qui venait d’arriver à Jacob Meskia.
Difficile d’aller le chercher cette nuit-là. La ville est quadrillée par des milliers de policiers et militaires qui ne tolèrent ni attroupement ni déplacement. Finalement, aux premières heures du mardi 20 décembre 2016, la mauvaise nouvelle tombe : « Jaco n’est plus ! ». Il a été tué par balle.
On retrouve son corps baignant dans son propre sang à quelques encablures du domicile familial. Ses proches fondent en larmes ; ses amis n’en croient pas leurs yeux. Quelques temps après, la dépouille est enveloppée dans un linceul, avant d’être acheminée à la morgue, sous l’escorte de la police et des membres de la famille. Rien ne sera fait pour Jaco avant un mot d’ordre du gouverneur de la ville…
Comme Jaco, beaucoup d’autres jeunes congolais ont laissé leurs peaux en cette date du 19 décembre. Quarante-quatre morts selon l’ONG Human Rights Watch, 19 selon l’ONU et 9 selon le porte-parole du gouvernement… c’est devenu tout un sujet à polémique. Mais au-delà de cette controverse des chiffres, il s’agit bien des vies humaines perdues, des hommes et des femmes tués par les forces de l’ordre.
Que les ames de nos freres et saeurs reposent en paix. Il sont morts pour une bonne cause. Et cette cause est la democratie,l’alternance,…