Chaque semaine, les agents de la Société nationale d’électricité (SNEL) font le tour de nos avenues pour le recouvrement des factures auprès des abonnés. Ils n’hésitent pas à demander des pots-de-vin pour ne pas couper le courant et arnaquent les citoyens. Avez-vous déjà imaginé ce que pourrait représenter l’argent que se font ces agents de la SNEL grâce à leurs magouilles ?
« La SNEL n’encourage pas la corruption. Cependant si le client a des dettes, nous lui venons en aide en exigeant juste une « bière » pour lui éviter la coupure. Il est vrai que la caisse de la société ne perçoit pas cette bière, mais nous n’y pouvons rien. C’est le mieux que nous puissions faire pour aider nos clients. » Ces propos contradictoires sont ceux d’un agent de la SNEL dont je tais le nom par honte et par respect pour lui. Ici, la corruption ne porte pas son vrai nom. A Kinshasa, la corruption s’appelle « aide », « madesu ya bana » (le haricot pour les enfants) ou « bière», comme l’agent le dit ci-haut.
En principe, lors des descentes sur le terrain, les agents de recouvrement de la SNEL devraient couper l’électricité aux clients dont les factures sont en retard de paiement, et les soumettre à une amande de 13,12 $ à payer à la caisse avant le rétablissement du courant. Cependant, cela ne se fait que très rarement, voire jamais.
Des agents demandent plus que les factures
Un matin, un agent de la SNEL frappe à ma porte. J’ouvre, il explique la raison de sa visite surprise : « Le recouvrement des factures en retard de payement. » Il me dit cela, une grosse pince et plusieurs autres outils électriques entre ses mains. Ce sont là les seuls signes qui l’identifient comme agent de la Société nationale de l’électricité. Aucun ordre de mission ni rien pour expliquer cette visite indésirable. « Votre facture de paiement, madame », me demande-t-il en lingala, sur un ton ferme. Cela me fait peur. Je rentre dans la maison et fouille dans mes factures éparpillées, passant en revue les unes après les autres, je ne retrouve pas celle qu’il voulait, malheureusement. Une frayeur m’envahit !
« Madame, j’attends toujours, hein! », me crie-t-il de dehors. Je commence un peu à transpirer. Je sors toutes mes factures, fouillant, refouillant, et ouf, je tombe enfin sur la fameuse facture qu’il me demande. Toute souriante et bien heureuse de savoir que je ne dépenserai rien, je ressors à sa rencontre avec ma facture et la lui présente. Il la parcourt de haut en bas, recto-verso… Il ne trouve rien à reprocher. « C’est bien madame, votre facture est correcte… », me lâche-t-il, apparemment un peu triste. Il sort de chez-moi finalement, mais tout en sortant, il glisse une phrase qu’il ne fallait pas : « Madame, tu peux pas m’offrir juste une petite bière ? » Sans dire un mot, je rentre et ferme la porte derrière moi.
L’argent de l’Etat dans les poches des agents
Je décide alors de mener une petite enquête sur son parcours sur notre avenue. Là, je découvre qu’il exige des sommes allant de 3000 à 7000 FC aux différents abonnés, même à ceux qui sont en ordre. Ils lui ont versé ces pots-de-vin, par ignorance bien sûr ! En multipliant ces chiffres par le nombre de parcelles qu’il visite sur l’avenue, je découvre que cet agent de la SNEL subtilise au moins 43 500 FC par visite dans cette rue uniquement. Ajoutez à cela d’autres rues. Combien obtient-il par tour et par mois avec cette pratique ? Ces sommes qui lui sont remises par les clients, arrivent-elles dans les caisses de la SNEL ?
Je ne cesse de me poser mille et une questions. C’est ainsi que l’argent qui aurait pu servir au paiement des factures, atterrit malheureusement dans les poches des individus. Sur son site internet, la SNEL précise qu’en dehors de ses caisses, aucun agent n’est autorisé à encaisser l’argent… « Tout autre acquit est sans valeur et n’engage pas la responsabilité de SNEL ».
Alors, la prochaine fois qu’un arnaqueur frappera à votre porte au nom de la Snel pour vous demander une quelconque somme d’argent, n’hésitez pas à appeler le centre de vente et de service de la SNEL au numéro correspondant à votre quartier sur ce site ici.