Du temps de l’ancien président Joseph Kabila, l’on pouvait tous se rendre compte de la terreur qu’inspiraient les agents des services de renseignement. Que l’on soit citadin ou villageois, avoir affaire à l’Agence nationale de renseignement (ANR) était un cauchemar que tout le monde redoutait.
À l’avénement du président Félix Tshisekedi, on a vu sa volonté affichée de supprimer des cachots parfois secrets tenus par les tristement célèbres services de sécurité congolais. Seulement voilà, mes deux récents voyages professionnels à l’intérieur de la province de la Tshopo m’ont donné l’impression que l’ANR continue à perpétuer sa mauvaise réputation.
Immixtion dans les affaires privées
Le travail de L’ANR consiste à investiguer, traiter et opérationnaliser les informations susceptibles de porter atteinte à la sécurité des personnes, à la sûreté de l’Etat et à l’ordre public. Eh bien, dans le territoire d’Isangi, les agents de l’ANR vont au-delà : ils traitent même des conflits de famille. Ils se font passer pour des juges des affaires civiles, au point d’exiger des amendes aux parties incriminées. Pire encore, ils veulent faire la morale aux paysans alors qu’eux-mêmes ne sont nullement des exemples à suivre.
Empiètement sur les fonctions de l’autorité administrative établie
Les chefs des villages sont à la fois des autorités coutumières et administratives établies. En tant que tels, ils sont des représentants de l’Etat et sont qualifiés pour gérer leurs entités territoriales déconcentrées. En principe, les agents de renseignements devraient collaborer avec eux.
Force est de constater que certains agents de renseignement dans les milieux ruraux ne l’entendent pas de cette oreille. A Yalikombo, dans la chefferie de Yalihila, un agent de l’ANR m’a obligé de faire « aviser » mon ordre de mission malgré le fait que le chef du village l’avait déjà fait. J’ai catégoriquement refusé et lui ai expliqué qu’il n’en avait ni la compétence ni la qualité.
L’ANR semble demeurer encore une institution monstre qui terrorise en milieu rural et concourt aux violations des droits humains. Envisager un renforcement des capacités de ses agents et un contrôle hiérarchique notamment par les voyages d’itinérance des autorités contribuerait substantiellement à l’éradication de ce phénomène.