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Barnabé Kikaya, le père de la « République des Métis »

Le conseiller du chef de l’État en matière de diplomatie, Barnabé Kikaya, a osé lâcher une phrase qui n’est pas passée inaperçue. Dans une interview au journal Le Monde, il a qualifié le rapprochement entre Moïse Katumbi et Sindika Dokolo, d’une « République des Métis ». Cette phrase alimente aujourd’hui toutes les conversations  des internautes congolais.

De tels propos de la part d’un conseiller du chef de l’État exhalent un relent de racisme. Le pays n’en a vraiment pas besoin. On ne devrait pas juger les gens sur la base de leurs origines raciales. Ce sont des propos qui n’aident ni monsieur Kikaya lui-même, ni le président Kabila qu’il prétend défendre. On sait que si Katumbi décidait de revenir dans la majorité présidentielle, Barnabé Kikaya ne tiendrait pas les mêmes propos.

En parlant de la « République des Métis », Barnabé Kikaya a oublié que des métis, il y en a dans l’opposition comme dans la majorité présidentielle. Et oui ! À commencer par l’épouse même du chef de l’État, Olive Lembe Kabila. Il y a aussi le président du Sénat, Léon Kengo Wa Ndondo ; mais également l’homme d’affaires et ancien gouverneur de l’ex-Province-Orientale Jean Bamanisa, l’écologiste Didas Pembe, le porte-parole du G7 Olivier Kamitatu, etc. Pourquoi stigmatiser seulement Katumbi et Dokolo ? Ce sont deux têtes qui ne plaisent pas, on le sait.

Le Congo est métissé depuis longtemps

Pour rappel, le métissage des populations du Congo ne date pas d’aujourd’hui. Dans son livre intitulé, « Noirs, Blancs, Métis: La Belgique et la ségrégation des Métis du Congo belge et du Ruanda-Urundi (1908-1960) », Asumani Budagwa retrace ce chapitre méconnu de l’histoire de la colonisation. Il parle des enfants nés d’une relation entre un père belge et d’une mère congolaise, rwandaise ou burundaise. Ce document évoque le cas de 20 000 enfants métis qui seraient nés pendant cette époque, tout en rappelant qu’il n’y a pas de chiffres précis. Si ces enfants ne sont ni Belges, ni Congolais,  d’où sont-ils alors ? De la République des Métis ? Foutaises !

Sur cette question, le code congolais de la famille, Livre I sur la nationalité, a déjà tranché en ces termes :

« La nationalité congolaise d’origine est reconnue dès la naissance à l’enfant en considération de deux éléments de rattachement de l’individu à la RDC, à savoir sa filiation à l’égard d’un ou de deux parents congolais (jus sanguinis), son appartenance aux groupes ethniques et nationalités dont les personnes et le territoire constituaient ce qui est devenu le Congo à l’indépendance (jus sanguinis et jus soli) ou sa naissance au Congo (jus soli). » (Loi N° 04/024 du 12 novembre 2004).

Si la loi reconnaît la « congolité » aux Métis, de quel droit peut-on les mépriser pour des raisons politiques ? Mieux vaut une bonne « République des Métis » plutôt que la « République bananière » actuelle de la Majorité Présidentielle.  

Les Occidentaux mettent les dirigeants au Congo ?

Cette phrase raciste réveille l’épineux débat sur la double nationalité au Congo. Qui est Congolais et qui ne l’est pas ? Car ces Métis qui sont aujourd’hui dans l’opposition, étaient hier membres de la majorité. Pour autant, ils n’étaient pas moins métis hier qu’ils ne le sont aujourd’hui.

Toujours dans cette interview au journal Le Monde, le diplomate Kikaya a glissé une autre phrase tout aussi extravagante. Il dit : « Les Occidentaux disent vouloir en finir avec Kabila. Mais pour mettre qui à la place ? » Ah bon ! Ce sont donc les Occidentaux qui élisent les dirigeants chez nous et qui les changent quand ils veulent ? Que fait le peuple congolais dans tout ça ?

Pour un spécialiste de la diplomatie, cette sortie médiatique de Barnabé Kikaya a raté sur toute la ligne. Il doit savoir que c’est notre diversité qui fait notre force dans le monde.

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Les commentaires récents (1)

  1. Le mot « métis » renvoie à la notion de « race ». Selon le dictionnaire Robert, le métis est celui : « dont le père et la mère sont de races différentes ». Nous devrions pourtant savoir, aujourd’hui, qu’il n’existe pas de « races » dans l’espèce humaine, quelles que soient les différences de couleur ou d’apparence. Un Suédois peut s’accoupler avec une Bantoue ; un Chinois peut s’accoupler avec une Française, un Inuit avec une Irlandaise, etc. Ces unions ne sont pas stériles, et les enfants de ces couples ne sont pas non plus stériles. CQFD : Tous ces individus appartiennent donc à la même race : la race des hommes. Nous sommes d’ailleurs tous métis, d’une certaine manière. La nature est ainsi faite, d’ailleurs, que les unions entre individus génétiquement très proches donnent souvent des descendants « tarés » (au sens médical de ce terme) ; alors que les métissages génèrent des descendants aux qualités physiques indéniables. Si l’on remonte l’arbre généalogique d’un individu, quel qu’il soit, on arrive toujours à des ancêtres appartenant aux « races » les plus improbables, sans même parler des naissances illégitimes.
    D’ailleurs, quand bien même le métissage serait une notion réelle, en quoi serait-il un défaut ? J’aime l’idée que les USA métissés (n’en déplaise à Trump) aient eu à leur tête, avant le dangereux clown qui sévit aujourd’hui, un métis…