Dans la précédente partie de ce blog, j’ai montré que la justice n’a pas du tout pris au sérieux le dossier de viols massifs des prisonnières à la prison de Kasapa. C’était au cours d’une tentative d’évasion par un groupe de prisonniers considérés comme des ultras. Pas d’expertise médicale requise pour attester ces viols. Pas de procès digne de ce nom, encore moins une instruction dûment réalisée jusqu’à présent. Tout donne à croire que le dossier a été négligé.
Une année après les viols, en effet, les victimes sont restées sans assistance ni assurance que quelqu’un paie pour ces actes. Trois parmi elles ont contracté le VIH, treize ont eu des grossesses non désirées.
Pas d’assistance psychologique
Alors que ces victimes ont peut-être réussi à vivre avec cette triple peine (déni de justice, viol et grossesses non désirées), elles doivent commencer à se préparer à un procès. Si courageusement une mère a décidé de garder sa grossesse, il faut craindre qu’elle vienne à détester l’enfant né dans ces conditions.
« Les autorités devraient fournir aux survivantes des soins médicaux et un soutien psychologique adéquat. Elles devraient enquêter de manière crédible et impartiale sur ces incidents, y compris sur les responsables qui ont ignoré plusieurs avertissements selon lesquels une émeute se tramait, et poursuivre en justice de manière équitable les auteurs d’abus », a déclaré en septembre 2021, l’ONG HRW.
Tout cela, simplement parce que des criminels (dont l’Etat qui devait assurer la prise en charge) ont bénéficié d’une défaillance administrative grave. Des semaines avant les émeutes à la prison de Kasapa, l’administration pénitentiaire avait alerté les autorités sur les risques encourus. Les actions n’avaient malheureusement pas suivi immédiatement.
Notre hypocrisie, notre lâcheté sur les viols et les VBG
L’ONG HRW qui rapporte ces éléments indique que même si seulement treize personnes ont avoué avoir subi des viols, plusieurs autres l’auraient vécu et n’auraient pas le courage d’en parler. Elle indique, en effet, que la majorité des femmes détenues, peut-être même toutes, avaient été violées. Ces gens craignaient la stigmatisation associée aux agressions sexuelles. « Des informations crédibles ont également fait état du viol de six hommes et garçons », précise l’ONG.
Reconnaissons toutefois ici qu’en une année, trois audiences ont été organisées. Mais tout cela sans que l’on ne progresse vraiment sur le dossier. Qu’ont fait les magistrats et les avocats ? Peut-être ont-ils négligé ce dossier parce qu’il ne s’agit pas de leurs proches.
Viols, VBG : et si les victimes étaient nos épouses ou enfants ?
Tout cela, sans doute parce que l’Etat n’a pas assumé ses responsabilités. Et, le même encore, continue d’infliger aux victimes de nouveaux tracas en n’organisant pas bien les choses.
Ce que cette histoire enseigne, c’est notre attitude laxiste et notre, négligence en tant que société, face aux viols. Disons, face aux violences faites aux femmes. On ne peut pas se mobiliser pour rendre justice. Nous nous levons rarement pour dénoncer ce genre d’actions. Probablement parce que cela arrive à quelqu’un d’autre. Et si un jour la victime était une épouse, une sœur, sa propre fille… Qu’aurions-nous fait ? Pauvres hypocrites que nous sommes ! Nous avons fait preuve de lâcheté.
Un défenseur des droits humains explique : « L’absence sérieuse sur l’émeute de la prison de Kasapa est emblématique du désintérêt de longue date du gouvernement pour les prisons congolaises et les personnes qui y sont incarcérées ».
Pour Thomas Fessy, auteur de cette déclaration, « le gouvernement de la RD Congo devrait adopter des mesures visant à préserver la dignité et la sécurité des détenu·e·s et assurer que toutes ces personnes, en particulier les femmes et les filles, soient à l’abri de violences sexuelles ».