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Kalehe : s’enrôler massivement pour sanctionner les mauvais députés

Depuis longtemps, les habitants de Kalehe au Sud-Kivu se plaignent du silence de leurs élus aux parlements face à leurs problèmes locaux. Ils sont représentés par huit députés (quatre nationaux et quatre provinciaux). Déçus par l’attitude de tous ces élus, nombreux à Kalehe ne veulent pas se faire enrôler pour les prochaines élections. 

Certains vont jusqu’à faire du porte-à-porte pour décourager les gens d’aller voter. La Dynamique de la jeunesse de Kalehe est entrée en jeu en lançant une campagne de sensibilisation visant à pousser la population à se faire enrôler. « Ma carte d’électeur, c’est mon arme pour sanctionner les députés qui ont failli à leur mission », tel est leur slogan. Habari RDC a rencontré le coordonnateur de cette Dynamique des jeunes.

Habari RDC : Que signifie Dynamique de la jeunesse de Kalehe ?

Erick Dunia : Nous sommes une plate-forme composée d’organisations de la société civile œuvrant pour la jeunesse à Kalehe, un des huit territoires du Sud-Kivu. Kalehe est un territoire cosmopolite où cohabitent les ethnies hutu, hunde, tembo, shi, rega, rongeronge, havu et tutsi. Nos actions portent surtout sur la sensibilisation de la jeunesse pour une nouvelle prise de conscience. L’objectif est de pousser notre territoire de Kalehe à aller de l’avant.

Pourquoi avoir voulu mener une telle campagne de sensibilisation ?

Parce que la méfiance face au processus d’enrôlement et d’identification des électeurs était grande. La population n’en voulait plus. Elle se dit choquée de voir qu’elle a élu huit représentants mais que ces derniers, une fois arrivés dans les Assemblées, n’ont pas tenu leurs promesses données pendant la campagne électorale.

Ces élus de Kalehe ont initié des projets non citoyens, qui n’ont aucun impact positif sur leur base. Des projets trompe-l’œil. Par exemple, distribuer de l’argent et des petits cadeaux lors de leurs vacances parlementaires. Comme ils savent que la population est dans une pauvreté extrême, ils ont pensé que ces petits cadeaux leur permettraient d’éviter de donner à leur base électorale le bilan de leur travail parlementaire. Cela n’a marché que pour un petit moment, et nos parents ont fini par découvrir ces manœuvres. C’est pourquoi la population est  très en colère. Elle fait du porte-à-porte pour demander à ce que personne n’aille se faire enrôler, de peur de voter encore d’autres ingrats.

Pour nous les jeunes, étant donné que ceux qui refusent de se faire enrôler sont nos aînés et les séniors, nous leur disons : « Pères, mères, frères et sœurs, oncles et tantes, vous vous trompez en refusant l’enrôlement ! Ce sont les élections qui vous donnent le vrai pouvoir de bien vous exprimer afin de ‘’punir’’ ces députés jugés défaillants. »

Vous êtes tous si jeunes. Que faites-vous concrètement pour convaincre votre communauté ?

Nous menons une campagne de formation et d’information. Nous disons à la communauté que l’enrôlement et les élections sont des devoirs et des droits civiques que nous devons accomplir. En plus, quand on a sa carte d’électeur, on est sécurisé, car cela vous identifie comme Congolais dans ce pays où les cartes d’identité n’existent plus.  Nous rassurons la population en leur disant qu’ici à Kalehe, c’est encore possible d’avoir des personnes qui peuvent changer les choses. Et pour qu’elles y arrivent, elles ont besoin d’être élues.

Nous réalisons des émissions sur nos radios communautaires pour persuader la population. Nous faisons aussi du porte-à-porte et notre communauté nous fait désormais confiance. Des spots publicitaires passent en ce sens en boucle à la radio. Nous organisons aussi des formations gratuites sur le processus électoral pour les hommes et femmes en âge de voter. À ce sujet, nous visons surtout le changement des mentalités. Plus question de voter pour des gens contre des t-shirts, des pagnes, des chapeaux et quelques sachets de sel. Cette fois-ci, il faut voter pour des projets de société convaincants.

Que demandez-vous aux autorités ?

On ne leur demande rien, si ce n’est de faire leur devoir ! Nous ne prenons rien des autorités. C’est notre philosophie, car les politiciens sont méchants. Nous sollicitons de la part de la CENI une étroite collaboration pour que nos objectifs soient atteints : formation, information et mobilisation. Au lieu de pleurnicher, la population doit plutôt prendre son destin en main par la voie des urnes.

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