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Keba (Epoti) : le tube du groupe MPR qui décrit la relation entre candidats et electeurs en RDC

La première fois que j’ai écrit un billet sur le groupe de rap MPR de Kinshasa, c’était en 2021, à l’occasion de la sortie du clip Nini Tosali Té (Que n’avons-nous pas fait ?). Je m’insurgeais contre l’idée de laisser transparaître que notre jeunesse aurait déjà tout fait, tout essayé, et que rien ne marche. Car, à mon avis, la jeunesse congolaise a encore beaucoup à faire pour placer le pays sur la voie du développement.

Aujourd’hui, après avoir écouté cinq fois le tube Keba (Epoti) [Attention, en lingala], je trouve que les membres du groupe MPR sont dans leur rôle d’artistes. Ils ont dépeint de la manière la plus parfaite, la relation déséquilibrée qu’il y a entre candidats et électeurs dans notre pays. Voilà pourquoi leur clip me séduit.

Le tube débute par un candidat qui promet monts et merveilles à ses électeurs. Le candidat projette de « reconstruire ce pays avec la jeunesse congolaise », ce pays qu’il qualifie de « longtemps meurtri ». Mais le plus frappant à mon avis, c’est le comportement du peuple lui-même : On les voit affamés, mais emportés dans une sorte d’hystérie qui les pousse à glorifier le candidat.

« Ventre affamé n’a que mains pour applaudir » !

Comme l’a dit RJ Kanierra, musicien très connu à Lubumbashi, « Ventre affamé n’a que mains pour applaudir ». Voilà qui dépasse l’entendement. Comment convaincre un pauvre, -quelqu’un à qui l’on a tout pris-, de prendre conscience quand il est lui-même dans l’urgence de se remplir la panse ? Et le groupe MPR de s’exclamer : « Ce n’est pas une chanson, mais un cri de douleurs ! » Keba, est un cri de douleurs pour interpeller la conscience de l’électeur, sur sa capacité à voter utile.

Les mots trouvés pour décrire les maux !

En vrai groupe de rap, MPR sait bien jouer et jongler avec les mots pour décrire la situation entre candidats et électeurs. Voici quelques phrases que j’ai notées en écoutant son tube :

  • « Na mayi ya miso ya peuple ndé sauce na bango, pouvoir ezwa goût » [Les larmes du peuple c’est cette sauce qui donne du goût à leur pouvoir] ;
  • « Bazo sacrifier vérité, batiki lokuta na abri »[Ils sacrifient la vérité tout en mettant le mensonge à l’abri] ;
  • « Mayi na courant femme de nuit »[L’accès à l’eau et à l’électricité est semblable à la relation qu’il y a entre une « femme de nuit » et la personne sous sa hantise]
  • « Ba petites sœurs bazo teka nini ?», [Que vendent nos petites sœurs ?] ;
  • « Elections casting ya ba riches », « élections, une affaire des riches » ;
  • « Mélodie ya ba dialogues nionso esuka na ba notes ya mabé » [Tout effort de dialogue finit sur une mauvaise note] ;
  • « Vie na biso eza message oyo bazokoka kotanga té », Nos vies, voilà le message qu’ils n’arrivent pas à décoder

Je ne voudrais pas dresser une liste exhaustive de belles paroles de ce tube Keba. Il me semble que le succès de cette chanson vient du fait que les rappeurs ont décidé de prendre position en plaidant la cause du peuple. Après tout, « Qui peut prétendre faire du rap sans prendre position ? », demandait Youssoupha.

Bravo aux artistes !

 

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