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Les sécessions du Katanga et du Sud-Kasaï : quand le jeune Congo s’est déchiré

À peine née, la République du Congo devenue plus tard la République démocratique du Congo a failli ne jamais exister telle que nous la connaissons aujourd’hui.
À l’indépendance, le 30 juin 1960, le pays était déjà miné par des tensions politiques, ethniques et régionales. Moins de deux semaines plus tard, le Congo sombrait dans le chaos. Deux provinces riches et stratégiques le Katanga et le Sud-Kasaï choisirent la voie de la sécession, plongeant le jeune État dans une crise majeure.

Le Katanga : la sécession du cuivre

Le 11 juillet 1960, Moïse Tshombe, président du parti CONAKAT, proclame l’indépendance du Katanga, avec le soutien du ministre provincial Godefroid Munongo.
Le Katanga, province la plus riche du pays grâce à ses mines de cuivre, de cobalt et d’uranium, était le moteur économique du Congo belge. Mais derrière cette déclaration se cachait un jeu bien plus vaste :
la société minière Union Minière du Haut Katanga (UMHK) et les milieux d’affaires belges, craignant de perdre leurs privilèges, encouragèrent la sécession pour protéger leurs intérêts.

Tshombe, installé à Élisabethville (aujourd’hui Lubumbashi), mit sur pied un État katangais, avec sa propre armée, sa monnaie et même son drapeau.
Le gouvernement central de Patrice Lumumba y vit une trahison soutenue par la Belgique et tenta de reprendre le contrôle avec l’aide de l’ONU. Mais la Mission des Nations Unies au Congo (ONUC), bien que présente, refusa d’abord d’intervenir militairement, estimant que la crise était politique.

Ce n’est qu’en 1963, après de longs affrontements et l’intervention musclée des troupes onusiennes, que la sécession katangaise prit fin. Tshombe s’exila brièvement, avant de revenir plus tard comme Premier ministre du Congo sous Mobutu.

Le Sud-Kasaï : la sécession du diamant

Presque au même moment, une autre province prit le même chemin. Le Sud-Kasaï, dirigé par Albert Kalonji, se déclara “autonome” le 8 août 1960, puis “royaume du Sud-Kasaï”, avec Kalonji comme “empereur Mulopwe”.
Le conflit avait aussi des racines ethniques : le Sud-Kasaï était dominé par le peuple Luba, dont beaucoup avaient été marginalisés par d’autres groupes au sein de l’administration congolaise.

Le gouvernement central, voyant d’un mauvais œil cette nouvelle sécession, lança une offensive militaire brutale.
Les combats firent des milliers de morts, notamment parmi les civils, et provoquèrent un exode massif. La rébellion kasaïenne s’effondra en 1962, et Kalonji fut arrêté peu après.

Deux sécessions, un même message

Ces deux épisodes révélèrent les faiblesses du jeune État congolais : un pays immense, mal préparé à l’indépendance, miné par les rivalités régionales, les luttes de pouvoir et les ingérences étrangères.
Le Katanga et le Sud-Kasaï cherchaient, chacun à leur manière, à exister hors du contrôle central, dans un contexte où le sentiment national congolais restait encore fragile.

Ces sécessions ont profondément marqué l’histoire du Congo.
Elles ont montré que sans unité politique et justice sociale, même les richesses les plus abondantes peuvent devenir une malédiction.

 

Ce texte est publié dans le cadre du partenariat avec Bokundol consacrée à la sensibilisation autour des faits historiques de notre pays.  BOKUNDOLI, mot en lingala qui fait référence au fait de chercher profondément, creuser, fouiller, est une initiative d’historiens congolais qui s’inspire du travail réalisé par l’UNESCO autour de l’utilisation pédagogique du manuel de l’Histoire Générale de l’Afrique adapté au contexte culturel de la RDC. Retrouvez toutes les histoires sur http://bokundoli.org

 

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