Être civilisé ne veut pas dire que nous devons abandonner nos cultures alimentaires africaines. Certains pensent qu’ils sont plus à la mode lorsqu’ils utilisent les couteaux et les fourchettes à table. Je ne les juge pas. Seulement voilà, pour ce qui me concerne, villageois que je suis, je mangerai à la main.
Au village où j’ai grandi, on n’utilise pas de fourchettes ni de couteaux à table. Même le chef du village ne le fait pas. Le poisson, la viande de brousse, de poulet ou de chèvre, le fufu, le nshima, les légumes… tout ça on mange à la main. Pas besoin de fourchettes ni de couteaux.
Repas au village sous un arbre
J’adore ce moment au village. Un bon petit repas chaud l’après-midi avec grand-père. Si c’est une viande, on arrache un morceau avec les doigts, on le découpe avec les dents et on avale trois bouchées de fufu. C’est plus facile et plus rapide. Essayez vous me donnerez raison.
C’est même plus discret, contrairement aux couteaux et aux fourchettes qui font beaucoup de bruits dans l’assiette. Grin, grin, pan, croin grin… on dirait un atelier mécanique ! Et ça alerte même ceux qui n’étaient pas concernés par le repas. (Rire).
Les couteaux sont très dangereux à table
Je vous raconte une anecdote. Un jour, je suis entré dans un restaurant moderne où tout le monde utilisait le couteau et la fourchette pour manger. Les couverts comme vous les appelez. Je me suis fait servir du poisson et deux boules de nshima. Pendant que je terminais la deuxième boule, une dispute éclate entre deux hommes assis autour des tables voisines. Ils avaient apparemment bu un verre de trop et commençaient à se chamailler pour une affaire d’argent. L’un dit : « C’était 100 dollars », l’autre rétorque : « Non ! C’était 300 ! Tu me dois encore 200. » Ils se sont mis à se bousculer.
J’étais très inquiet parce qu’ils se pointaient les couteaux aux visages. Les mêmes couteaux qu’ils utilisaient pour manger. Les serveurs ont tenté de les calmer, mais en vain. C’était très compliqué à gérer, car chacun brandissait son couteau et sa fourchette. Et vous savez que ce sont des armes blanches.
A ce moment-là, j’ai dû quitter les lieux. Et j’ignore comment ce conflit s’est terminé. J’imagine que ça s’est certainement terminé dans un hôpital.
Non, je ne dis pas cela pour vous décourager à utiliser les fourchettes. Je dis simplement que parfois c’est dangereux à table. Bon appétit !