fillette vivant dans la rue de kinshasa à l'age de 12
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Mélanie : « Je ne suis pas enfant de la rue, mais la rue est le seul refuge que j’ai trouvé »

Babouches dépareillées aux pieds, robe rose décolorée, cheveux tressés abimés, Mélanie a 12 ans et sa vie a basculé alors qu’elle n’était qu’en 4e année primaire. Mélanie n’a pas fait le choix d’être dans la rue, mais la rue est le seul endroit qui l’a accueillie. Nous vous racontons son histoire.

Déjà orpheline de père, Mélanie est citée comme la cause de la maladie de sa mère par un mbikudi, un guérisseur des sorciers. Elle est alors qualifiée de sorcière après le décès de sa mère. Dans la famille, personne ne veut la recevoir. Ses frères et sœurs, tantes et oncles paternels, tous l’ont rejetée. La famille n’a trouvé mieux à faire que de confier Mélanie à ce fameux guérisseur des sorciers pour une délivrance. Torturée à plusieurs reprises et de bien des manières, la pauvre Mélanie est passée par plusieurs rites d’ordalie visant à extirper d’elle une prétendue sorcellerie dont ses détracteurs croient qu’elle est possédée. Sa tête a été rasée, on lui a fait boire de grandes quantités d’huile de palme, on l’a soumise à une purge à l’eau chaude pimentée, elle a même été contrainte de rester nue et affamée pendant des jours… Tout cela, dans le seul but de la délivrer de sa supposée sorcellerie.

Ne pouvant plus supporter ces souffrances, Mélanie s’est enfuie de chez ce mbikudi, le jour où celui-ci a oublié de fermer la porte de la chambre dans laquelle elle était prisonnière. N’ayant plus personne chez qui aller vivre,  Mélanie n’a pas d’autre choix que de se réfugier dans la rue. La pauvre. En RDC, la rue est en quelque sorte la mère et le logement de tous les rejetés de la société.

La rencontre avec la rue

Vivre dans la rue, c’est comme vivre dans la jungle. Il faut chasser pour manger. Une nouvelle vie commence pour Mélanie, avec de nouveaux défis. Trois années sont passées depuis que sa vie a pris ce virage vers la rue, son traumatisme est encore présent. Mais Mélanie doit se montrer forte car dans la rue il faut mendier pour manger, il faut ramener des sous pour être respecté et garder sa place. Après plusieurs mois passés à mendier en solo, Mélanie a rejoint un groupe de shégués dont Jordan est le leader. Plus âgé que tous, ce dernier se fait l’ange gardien de cette jeune fille fragile. Elle qui était exclue de sa famille, la rue lui donne une nouvelle famille.  

« Vivre dans la rue c’est pénible. Je dois mendier tous les jours dans l’espoir qu’une personne gentille me donne de l’argent. Je voudrais dormir sur un lit douillet comme avant, mais ce n’est pas possible. La rue n’a aucun confort. Je dois me contenter de morceaux de carton comme matelas et supporter les courants d’air qui soufflent pendant la nuit. Et quand il pleut c’est encore pire », confie-t-elle d’une voix  triste. « Les gens m’appellent shégué, mais je ne suis pas une enfant de la rue. Mais la rue est le seul refuge que j’ai trouvé », renchérit-elle.  

Avant de se retrouver dans cette situation, Mélanie comme ses autres copines de la rue, avait des rêves… Elle en parle en pleurant : « L’école me manque, et je voudrais y retourner pour poursuivre mes études jusqu’à la fin afin de devenir médecin. Mais je ne sais pas par quelle magie ce sera encore possible. Si mes parents étaient vivants, je ne serais pas ici ! »

Ils n’ont pas choisi d’être shégués

Remplie de foi, cette jeune fille en pleine puberté croit que les jours à venir seront meilleurs que ceux qu’elle vit actuellement. « Ma poitrine a grossi depuis un moment. J’ai des seins. Il y a trois mois j’ai eu mes premières règles. Je ne vais pas rester dans la rue car ici des hommes mal intentionnés veulent avoir des relations sexuelles avec moi. Je ne sais comment, mais je sais que je trouverai le moyen de m’en sortir. Dieu m’aidera », espère-t-elle avec conviction.

Mélanie n’est qu’un exemple des dures réalités que vivent les shégués que nous regardons souvent avec mépris. Ce sont des enfants avec des histoires qui méritent d’être écoutées et racontées. Non, ils ne sont pas enfants de la rue, c’est plutôt la société qui les a livrés à la rue. Il faut parfois les approcher pour comprendre qu’ils sont autre chose que des mendiants et des voleurs.

Alors que les élections approchent, nombreux sont ceux qui s’empressent de se déclarer candidats. Quels sont leurs projets de politique sociale ? Que réservent-ils comme issue à ces pauvres shégués ? Soyons plus humains, faisons un geste !

 


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