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Pourquoi pas un shegué député national en RDC ?

Il est bien clair que les « shegués », ces personnes vivant dans la rue préoccupent moins nos parlementaires. Mais l’heure de l’émancipation de ces compatriotes a-t-elle sonné, jusqu’à imaginer un de leurs devenir député ? C’est en tout cas le scénario imaginable après la fameuse lettre des shegués, fin 2017, refusant d’être instrumentalisés par les politiques en RDC.

En RD Congo, « shegués » ou « phaseurs », mots à connotation péjorative, désignent les personnes vivant dans la rue. On les stigmatise à Kinshasa. Lorsqu’il y a casse ou mécontentements populaires par exemple, les dirigeants ont pris l’habitude de qualifier les manifestants de voyous et de shegués. Pareil lorsqu’éclatent certaines scènes criminelles propres à la capitale congolaise : arracher des téléphone, des bijoux, etc.  Alors « ça leur convient », cette considération pas très cordiale, confie Paul Kpadyu, un habitant de Lubumbashi, mécontent de ces méthodes des shegués.

Shegués éligibles au Parlement

Dans les rues de Kinshasa, être « shegué » n’est pas toujours mal vu. On se rappelle que les chanteurs Koffi Olomide et Papa Wemba ont revendiqué l’identité shegué, un peu comme pour dire qu’ils sont proches d’eux et comprennent leurs problèmes. En réalité, cela traduit l’influence que ces shegués ont à Kinshasa. Non seulement dans la violence, mais aussi dans la popularité. Vous avez les shegués, vous avez le public avec vous, à Kin, où les politiques raffolent de publicité. En plus, cela doit être vu à la télé.

Même des membres du gouvernement, pas seulement sous le règne de Joseph Kabila, recourent à ces compatriotes pour montrer leur influence. Il y aurait entre 20 000 et 30 000 shegués à Kinshasa. Imaginez que tous vous portent dans leur cœur, qu’ils soutiennent votre candidature comme député… D’ailleurs, on raconte que certains députés aux discours trop légers auraient puisé abondamment leur vocabulaire dans l’électorat shegué. Pensons à présent au scénario extrême : un shegué influent candidat à la députation.

La Céni refuserait un shegué candidat député ?

A Kinshasa, tout chemin peut ramener vers le bonheur. Il faut savoir s’y prendre. Chacun attend surtout le jour de sa chance. Jour où il dira : « Dieu a exaucé ma prière », ou « asali miracle » (il a opéré un miracle). D’ailleurs, ne dit-on pas : « Chance eloko pamba », c’est-à-dire, « la chance est un hasard » ? Elle peut tomber sur tout le monde, sur n’importe qui.

A voir les discours sur les shegués, on risquerait de dire qu’ils sont n’importe qui. Ce serait en réalité manquer de respect à l’humanité et à des compatriotes. Pourtant, les laisser des décennies dans la rue, sans assistance ni protection, même lorsqu’éclatent des catastrophes naturelles, c’est déjà leur dénier l’humanité et la dignité.

Les shegués ne sont pas une identité au départ

Or la Constitution reconnaît la dignité à tout Congolais. Tout comme d’ailleurs le droit d’être élu à un poste. Sauf qu’ici, euh… la Constitution doit être expliquée. Il faut des diplômes… Pourtant, ce que font certains élus, certaines de leurs méthodes au Parlement, ne montrent pas combien nos députés et sénateurs méritent leurs diplômes. Certains sont réputés dormeurs, d’autres votent « oui », « contre » et « abstention » en même temps, d’après la satire du comédien Djasadjasa de Goma.

Il est donc important ici que notre pays soit sérieux et conséquent avec lui-même et avec ses lois. C’est presque clair que la Céni rejetterait une candidature d’un shégué à la députation au motif qu’il n’a pas étudié suffisamment, ou qu’il n’est pas de bonne mœurs. Des idées reçues qui peuvent bien être défendues. Mais à qui la faute si ces personnes sont marginales ? Car, même un haut dignitaire, une fois fini et à la retraite, peut finir dans la rue, et donc devenir shegué.

 


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