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Stéphane Kabila : se servir de l’art pour produire et transmettre le savoir africain

Philosophe et commissaire d’expositions congolais, Stéphane Kabila a initié, depuis 2018, une série de dialogues émancipateurs avec différents intervenants du monde de l’art. Son objectif : « Explorer les modes d’acquisition, d’expression et de transmission du savoir à travers l’art, en vue de développer de nouveaux discours sur la question. »

Pour Stéphane, tout part de la nécessité de répondre à une urgence qui est celle de parler de l’art contemporain à partir de nos milieux, pour apporter des réponses à nos problèmes. « Il suffit de dresser une liste de nos urgences sociétales et de réfléchir sur comment y répondre », explique-t-il. Son idée est d’engager une série de conversations avec des penseurs qu’il rencontre au pays et ailleurs, pour dit-il, « voir comment les artistes africains s’intègrent dans les conversations de l’art contemporain dans le monde ».

Son fil conducteur ainsi trouvé, Kabila crée en 2018, un abécédaire autour duquel il invite ses amis à jouer. Le principe est simple : chacun des participants tire un mot au hasard parmi ceux sélectionnés au préalable. Ensuite, le participant dit ce que le mot représente pour lui, et comment il se positionne par rapport au mot choisi, alors que la discussion est enregistrée. Tout ceci, dans la bibliothèque, transformée en terrain de jeu de circonstance, avec la possibilité pour les participants de lire des livres pour la plupart sur les arts.

Les parties de jeu sont un succès, et beaucoup d’artistes et de jeunes intellectuels de la ville y prennent part. Bientôt, les enregistrements sonores des discussions serviront de base pour imaginer, produire et diffuser toutes ces connaissances acquises.

En réponse à cet appel, Joseph Kasau (RDC) monte une installation projetant son film 20 ans d’âge  (9 minutes 29 secondes, en 2020) à côté d’une petite bibliothèque sur laquelle on voit du scotch en signe de croix. Est-ce pour appeler au recul ou à la révolte par rapport à l’acquisition par nous des connaissances préparées ailleurs ?

Ensuite, Oda Tungodden (Norvège) rend visite à des gens dont elle réalise des portraits en s’asseyant sur des poufs qu’elle a créés, tandis que Stéphane Kabila s’affaire à discuter avec elle. C’est l’exposition Résonance, ouverte à la Galerie nationale de Zambie à Livingston, du 26 janvier au 28 avril 2023. Une exposition, qui fait suite au projet Géométrie du désir, une archéologie de l’art et du savoir, initié dans le cadre de son master à l’Université de Bergen en Norvège.

De ce qui précède, on peut dire que le combat de Stéphane rentre dans une logique de la quête intérieure pour l’Afrique, qui doit apprendre à créer, produire et diffuser ses connaissances si elle veut conquérir et mériter sa place dans le monde. Et cela, peut passer par des liens et des mots que l’on utilise, ainsi que les pratiques qui vont avec, depuis le niveau local. Comme le disait Césaire : « Pour être universel, il faudra d’abord admettre que l’on est nègre ! » Voilà une façon pour les connaissances africaines de se faire une place, dans le concert des civilisations !

 

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