Témoignage d’un enfant ex-rebelle chez les ADF 

Fiston est un enfant d’une dizaine d’années. Il avait été recruté par force dans les rangs des ADF en janvier 2016 à Beni. Sa formation pour la guerre a duré trois mois. Il est orphelin et a réussi à s’échapper. Il raconte son histoire macabre. Interview. 

Comment tu es arrivé chez les ADF ?

Fiston : C’était un dimanche, il était environ 8 heures du matin et je me rendais à l’église. Au milieu de la route, je trouve un groupe d’une dizaine d’enfants comme moi. Ils étaient accompagnés par quatre militaires. Parmi eux, un militaire me récupère en me dit qu’il va nous accompagner jusqu’à l’église.

Mais ils changent très rapidement d’attitude et de direction. Ils demandent tout à coup violemment le silence. Direction la forêt de Mayangose près de Beni. J’ai été drogué au cours du chemin.

Et la suite ?

Fiston : Je me suis réveillé le lundi vers 13 heures. J’étais dans une formation militaire. Devant moi, il y avait des armes blanches. Ils nous apprenaient à les utiliser. On m’a demandé de prendre une machette puis ils ont amené un vieillard de plus de 70 ans et ils m’ont ordonné de lui couper la tête.

J’en étais incapable. J’ai refusé. Alors j’ai été torturé et ils m’ont coupé le petit doigt. J’étais dans l’obligation d’exécuter ce vieillard. Je ne savais pas les tactiques pour tuer à coup de machette. Après, nous avons été nourris de haricots mélangés avec du maïs.

Tu as participé aussi dans une opération ? 

Fiston : En avril, nous avons organisé une attaque contre la ville de Beni. Quand le chef a annoncé que nous irions livrer prochainement une bataille, je me suis senti soulager car je pensais que c’était l’occasion de m’enfuir et de retrouver  ma famille. Je rêvais de voir le levée du soleil. A 3 heures du matin, un certain vendredi, la cloche sonne et tout le monde est réveillé. Nous nous alignons devant le chef.

Je faisais partie de son escorte personnelle. J’avais une machette. Je goûtais toujours sa nourriture et sa drogue. Puis nous sommes ainsi partis dans la nuit en silence vers un village proche. Lors de l’opération, ils ont tué tous les hommes.  Le chef a violé une femme devant mes yeux et une fillette. Il a exigé que  je fasse pareil que lui. Et j’ai exécuté l’ordre. C’était ma première mission sous pression. J’étais drogué. Enfin, j’ai brûlé une maison.

Comment était votre fuite alors ?  

Fiston : Après cette mission, le chef ne doutait plus de moi. Un jour il m’a demandé avec quelques autres d’aller chercher de la boisson auprès de nos fournisseurs locaux. C’est à ce moment que j’ai saisi ma chance. En cours de route, j’ai sauté du véhicule qui roulait sur l’axe Kamango-Beni. Comme c’était en pleine journée, ils m’ont laissé partir afin d’éviter d’être repéré par l’armée et de ne prendre aucun risque. Une fois en sécurité, je me suis rendu à Goma.