Depuis la crise qui empoisonne les relations entre Kinshasa et Bruxelles, voyager dans l’espace Schengen quand on est Congolais est devenu très pénible. Certes, on a vu Kabila échanger récemment avec le chef de la diplomatie belge, mais depuis silence radio. Pendant ce temps, nos artistes ne peuvent pas voyager en Europe faute de visa.
Il est évident que quand deux éléphants se battent, ce sont les herbes qui en pâtissent. Le froid dans les relations entre Kinshasa et Bruxelles a conduit à la fermeture des chancelleries des pays de l’espace Schengen en RDC, avec comme conséquence la non-délivrance des visas pour les ressortissants congolais à Kinshasa. Il faut donc sortir du Congo pour chercher le visa Schengen à partir d’autres pays. Les ambassades européennes qui avaient accordé ce service au bureau belge à Kinshasa, restent fidèles à Bruxelles. Pourtant, ils sont nombreux, ces Congolais artistes et patients par exemple, qui ne peuvent plus voyager.
Les arts congolais se vendent mieux en Europe
Le Congo est une remarquable pépinière d’arts contemporains, toutes disciplines confondues. Le problème est que pour vivre de son art, le Congolais a besoin du marché européen, car les débouchés sont presque inexistants au pays. C’est avec raison que dans « Lobi Kuna » (avant-hier/après-demain), film du réalisateur belge Matthias De Groof, on entend un personnage qualifier le Musée royal d’Afrique centrale de Tervuren de « deuxième cimetière pour l’artiste congolais ». Une métaphore qui montre que l’artiste congolais tire plus sa légitimation des structures européennes que du marché local.
Pas besoin de parler de l’attrait pour ce marché européen de l’art avec des structures dotées de budgets colossaux et qui ne cachent pas leur envie de consommer l’art africain et congolais en particulier. Avec la difficulté d’avoir un visa Schengen, les artistes se voient condamnés à mourir avec leur art sur place en RDC.
Les frustrations créées par cette crise belgo-congolaise, qui ne profite à personne, sont de plus en plus nombreuses. Je pense à cet appel du 19 juin dernier sur le mur Facebook de Sinzo Aanza, écrivain et auteur de « Généalogie de la Banalité ». Il déclare : « Ceux qui sont à Paris ou de passage à Paris, passez voir l’exposition à la galerie Imane Farès. En attendant que leurs excellences veuillent bien nous remettre sur la carte du monde et que je puisse, enfin, voir cette exposition moi-même. »
Schengen ouvre toi !
Tout récemment encore, la plasticienne Tobe Geraldine, première africaine à être sélectionnée pour participer au grand prix d’art contemporain de Luxembourg sur une liste de douze personnes, n’a pas fait le voyage, faute de visa. Cette situation ne donnerait-elle pas raison à ceux qui pensent qu’on travaille, en RDC, dans le sens d’annihiler les passions de nos artistes et de nos chercheurs, en les privant de visibilité ? Quoi qu’il en soit, il est temps que les relations entre la Belgique et le Congo redeviennent normales. Schengen, ouvre-toi !
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Il est impérieux que nous dépendions de plus en plus de nous-mêmes en dépit du fait que la réalité de la globalisation est bien là…