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Arlène Agneroh, arrêtée pour avoir défendu son passeport

La jeune entrepreneure congolaise Arlène Agneroh a été arrêtée le 20 septembre à Kinshasa. Elle faisait partie de la vingtaine de jeunes qui manifestait devant le ministère des Affaires étrangères contre la suppression des passeports semi-biométriques et qui ont été interpellés. Arlène Agneroh est directrice générale de « Kukula Group », une entreprise sociale. Elle explique à Didier Makal pourquoi elle a décidé de se joindre aux Congolais indignés par la mesure gouvernementale.

Habari RDC : pouvez-vous expliquer dans quelles circonstances vous et vos proches avez été interpellés par la police à Kinshasa ?

Arlène Agneroh : Le soir du samedi 16 septembre 2017, j’apprends par le moyen de Facebook que le gouvernement de la RDC a décidé d’annuler les passeports semi-biométriques. Je me suis intéressée à une communication qui faisait appel aux citoyens lésés par cette décision du gouvernement car leur passeport sera invalidé le 16 octobre.  

Le mercredi 20 septembre, nous avons constitué un groupe de 30 personnes. Nous nous sommes dirigés vers le ministère des Affaires étrangères pour déposer un mémorandum au vice-ministre Aggée Aje Matembo Toto. « Nous venons en paix », avons-nous écrit sur des papiers. Malgré cela, au bout de 15 minutes, les policiers nous ont brutalisés et embarqués dans six jeeps jusqu’à l’Inspection de la police de Kinshasa où nous avons passé plusieurs heures à être entendus sur PV et à répondre aux questions des policiers.

Vous êtes une jeune entrepreneuse. On peut présumer que tout va déjà mieux pour vous. Pourquoi manifester pour le renouvellement du passeport ?

Tout ne va pas mieux pour moi. Parce que je suis jeune entrepreneure dans un pays qui n’a pas encore su créer un écosystème qui favorise l’entrepreneuriat des jeunes. J’ai tellement de défis à surmonter que la décision du gouvernement au sujet des passeports semi-biométriques a été comme une menace. Lorsqu’on est entrepreneur tout ce qu’on fait est mesuré et évalué. Ma décision d’aller déposer un mémorandum était réfléchie. Ce jour-là, je voulais faire comprendre à la population congolaise active sur Facebook qu’au-delà de la campagne virtuelle, nous avons une responsabilité en tant que citoyen. Nous devons jouir pleinement de notre droit de dénoncer ce qui ne semble pas correct. Albert Einstein a dit : « Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire ».

S’il vous était demandé de proposer une solution qui convienne et au gouvernement et aux porteurs de passeports en RDC. Que donneriez-vous comme idée ?

Après des recherches, nous avons trouvé que la RDC n’est pas le seul pays au monde actuellement à avoir en circulation simultanément deux ou plusieurs types de passeports. Des pays comme le Canada, la France et la Grande-Bretagne sont dans la même situation. Il serait correct de laisser en circulation les passeports semi-biométriques jusqu’à la fin de leur validité.

Sur votre compte Facebook, vous parlez des méthodes pour arriver au changement en RDC. Un changement à tous les niveaux, pas seulement en politique. À quelles méthodes particulièrement faites-vous allusion ?

On a longtemps eu un problème de leadership. Il nous faut des leaders visionnaires et des modèles à suivre. Je propose un leadership participatif qui appelle chacun à se donner la responsabilité d’être une partie de la solution aux problèmes de notre pays. Nous devons laisser un héritage aux générations futures. Ce message pourra être véhiculé par notre comportement et notre discours. Le premier changement en RDC est une affaire de mentalité. Ceci se résume par un credo que nous avons l’habitude de communiquer : « Pas le Congo sans moi ».

Qu’est-ce que les jeunes devraient faire pour que leur voix porte davantage auprès des décideurs ?

Les jeunes devraient s’organiser et se constituer en réseau, ce qui leur permettrait de créer une chaîne de solidarité dans tous les domaines de la vie socio-économique et politique. Etablir un réseau, vous aide à avoir assez d’éléments pour constituer des dossiers solides afin de faire du plaidoyer et du lobbying. Cela permet de résoudre les problèmes qui rongent notre énergie et notre génie.

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