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Dans l’ex-Katanga, les enfants Gécamines espèrent toujours

« Gécamines njo baba, njo mama », traduisez : « Gécamines c’est mon père, c’est ma mère ». La phrase est bien connue des Congolais qui sont nés ou qui ont grandi durant les années glorieuses de la Générale des carrières et des mines (Gécamines), société minière publique de cuivre et de cobalt. Avant sa chute en 1990, la Gécamines était la vache laitière de nombreuses familles. Aujourd’hui encore, ce n’est pas fini : du moins dans la tête de ces personnes.

J’ai expérimenté cette incompréhension lors d’un atelier sur le leadership et l’entrepreneuriat des jeunes à Kambove, une cité minière du territoire du même nom. Comment dire aux jeunes qu’ils doivent se libérer et voir leur avenir sans la Gécamines, me suis-je plusieurs fois demandé. Certains jeunes n’ont pas réalisé que la Gécamines est morte, qu’il faut aller voir ailleurs. Ils restent les enfants de leurs parents. Des « enfants Gécamines », comme on les appelait aussi à l’école. Lorsque sonnait cette appellation, tout le monde comprenait que ces enfants « sont exemptés de certains frais d’études », car la « mère Gécamines » s’occupait de tout.

Fort malheureusement, plusieurs interventions à cet atelier de Kambove ont dévoilé les stigmates de cette ère glorieuse passée, voici deux décennies. À l’époque, c’était une prise en charge totale : logements, nourriture, soins médicaux… « J’ai fini mes études en géologie, mais je n’ai pas de travail. En plus, la plupart des entreprises locales embauchent souvent soit sur recommandations, soit proposent un salaire infime. Que dois-je faire ? Que le gouvernement prenne ses responsabilités ! » Belle interpellation. Mais notre ami souffrira longtemps, car on ne sait pas quand viendra ce fameux gouvernement « capable de prendre ses responsabilités ». En attendant, il restera peut-être encore longtemps sous le toit parental, au chômage, malgré son grand et coûteux diplôme d’université.

Sortir de la dépendance historique de la Gécamines

Kileme Héritier est ingénieur agronome. Il partage ses observations sur l’esprit d’initiative des enfants Gécamines : « Ils sont très peu à penser à l’entrepreneuriat dans la cité de Kambove car beaucoup restent nostalgiques de la vieille époque. Ils s’imaginent la vie, en grande partie, comme à l’époque de leur enfance dans des cités Gécamines, avec des cantines scolaires. » Kambove n’est qu’un des exemples illustratifs de cette dépendance historique de la Gécamines. Car ces « enfants Gécamines » sont aussi des parents, premiers auteurs de cette phrase devenue magique : « Gécamines njo baba, njo mama. »

Même en allant travailler ailleurs, dans des sociétés privées ou publiques, les anciens « Gécaminards », autre appellation consacrée, espèrent un traitement similaire à celui de la Gécamines. Ceci n’est pas mal en soi. Mais s’y attacher fortement ne permet pas une adaptation rapide, par contre cela les détruit.

Heureusement, des jeunes comme Musuba Delveaux, font l’exception. Enseignant de son état, il est à l’initiative d’une ONG locale d’assistance aux jeunes désœuvrés de Kambove qui tente de les autonomiser. Son vœu est que l’expression « Gécamines c’est mon père, Gécamines c’est ma mère » cesse d’exister.

 


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Les commentaires récents (3)

  1. monsieur, qu’ à l on nous faire dans. ce cas?? nous avons l Esprit d initiatif mais les financement nous marque.

  2. Courage à ceux qui acceptent leurs.situations actuelles et se battent pour vivre, et surtout survivre, selon le contexte du monde actuel. Adieu la #Nostalgie

  3. Vraiment! En tant que RESOJEC, nous avons encore du pain sur la planche.
    Courage Mr. KAKEL d avoir osé à rêver l esprit longtemps somnolent de ces jeunes.
    Les informés pour l éveille c’est bien, mais Ils ont encore et beaucoup plus besoin de notre encadrement et accompagnement.

    Grand merci pour votre article.

    Yan MUSAJA